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Antirouille

Chère amie, cher ami,

Au cours d’une émission à laquelle je participais sur Europe 1, la diététicienne Angélique Houlbert évoquait « ce portail rouillé qui grince » pour désigner le corps vieilli.

Belle image ! Il n’y a pas que le portail qui grince, nos articulations aussi ! Il n’y a pas que le portail qui s’écaille, notre peau aussi se ride, quand il ne s’agit pas de notre mémoire ou de nos facultés d’adaptation qui s’érodent…

Si vous aviez protégé plus tôt votre portail par un enduit ou une peinture appropriée, il ne se serait pas dégradé ainsi. La rouille l’aurait épargné.

Après tout, ce n’est pas dramatique. Tant qu’il s’agit de votre portail ou de la carrosserie de votre voiture, vous aurez toujours la possibilité de les traiter, de les repeindre.

Les choses sont moins simples lorsqu’il s’agit de votre propre corps.

Cette réaction chimique, qu’on appelle oxydation, n’est autre que l’effet délétère de l’oxygène sur le métal. On va la retrouver partout.

Dans la cuisine par exemple.

L’odeur désagréable du beurre « rance », laissé trop longtemps à l’air libre, est également le résultat de son oxydation : elle ne vous donnera pas vraiment envie de le consommer.

C’est cette même odeur que vous percevrez dans la transpiration, sous les aisselles de beaucoup d’entre nous qui pratiquons un exercice un peu rude. Pourquoi ? Parce que l’exercice qui produit notre transpiration accroît également notre consommation d’oxygène.

Lors de l’émission de radio dont je vous parlais plus haut, j’ai comparé cette odeur de « beurre rance » à celle que l’on détecte en entrant dans la chambre de certains malades ou personnes âgées : il y a bien une ressemblance ou une analogie entre les deux, mais la comparaison s’arrête là.

Tant pis pour le beurre, vous pouvez le jeter et en acheter une autre plaquette au supermarché. Mais que dire à la personne qui se tient face à vous, et qui, bien entendu, ne se rend pas compte de son odeur car elle y est habituée ?

À l’avenir, pour ce qui est du beurre, pour éviter de devoir le jeter et pour mieux le conserver, il faudra l’emballer correctement, dans une boîte étanche à l’oxygène, et le garder au frais. Il sera alors protégé de l’oxydation, du rancissement, du vieillissement : il gardera son goût, sa bonne odeur et vous aurez envie de le consommer, en restant sage toutefois sur les quantités !

Quant à la pomme ou la poire dont vous avez laissé un morceau pour le consommer plus tard, sa surface brunâtre ne vous rappelle-t-elle rien ? L’oxydation, encore.

L’industrie agroalimentaire, elle, a bien assimilé les effets de l’oxydation sur les produits qu’elle s’efforce de nous vendre dans les rayons de ses hypermarchés. Pour s’en rendre compte, il suffit de lire la composition de beaucoup d’aliments industriels ou semi-industriels tels les gâteaux secs.

Vous trouverez immanquablement sur l’étiquette la mention « antioxydant » ou « agent de conservation ». Ces vocables sont souvent synonymes.

Que se passerait-il si le fabricant n’avait pas ajouté cet additif ? Vous ne trouveriez plus que des gâteaux rances dans l’emballage, c’est-à-dire des gâteaux oxydés.

Alors, comment faire pour que notre « portail » ne grince plus, pour que notre organisme ne « rouille » plus ?

Qu’est-ce que l’oxydation cellulaire ?

D’abord, il faut commencer par un (petit) exposé scientifique.

Que signifie le terme oxydation ? C’est la modification structurelle et biochimique de toute structure, vivante ou non, exposée à l’air et à l’oxygène qu’il contient. Il en va de la pomme comme du portail en métal.

En fait nous vivons et nous mourrons grâce à l’oxygène dont nous avons absolument besoin. On nomme ce phénomène « paradoxe de l’oxygène » !

L’oxygène nous permet de vivre grâce à ces « poumons cellulaires » que l’on appelle mitochondries, mais certains de ses dérivés ou des produits de sa réaction dans nos cellules provoquent de l’oxydation. C’est le fameux « stress oxydant » dont les « radicaux libres » sont les agents élémentaires.

Or, nous avons besoin de ce stress pour nous défendre contre des agents infectieux (bactéries, virus…). Mais dans une certaine mesure, car lorsqu’il échappe à notre contrôle, il produira sur nous les mêmes effets pathologiques que sur un morceau de métal ou n’importe quel tissu biologique.

C’est donc bien la production en excès de ces radicaux libres ou espèces oxygénées activées (EOA) qui va accélérer notre vieillissement, le risque ou l’agressivité de certaines maladies.

Pour bien vieillir et se prémunir des maladies, ce stress oxydant doit donc être contenu et régulé par l’action des antioxydants internes ainsi que par l’apport, extérieur, nutritionnel en molécules antioxydantes apportées par l’alimentation ou si besoin en compléments alimentaires.

Il faut ainsi veiller à équilibrer la balance entre oxydants et antioxydants, et maintenir l’équilibre entre les bienfaits et les méfaits du métabolisme de l’oxygène.

Les radicaux libres : nos meilleurs amis et ennemis !

On en entend souvent parler en mal. Oui, les radicaux libres ont plutôt mauvaise presse. Mais qui sont-ils vraiment ? En voici une définition, très simple : un radical libre est un atome ou une molécule qui a gagné ou perdu un électron, et se trouve ainsi très instable. Il n’aura alors de cesse de capter ou céder un électron à une autre molécule de son entourage, propageant ainsi le phénomène. Cette réaction en chaîne est appelée communément « stress oxydant ».

Sans utiliser un indigeste jargon biochimique, on peut dire qu’un radical libre est un atome, une molécule ou un groupe d’atomes présentant un électron célibataire sur son orbitale externe.

Attention, il ne serait pas juste de considérer le radical libre comme l’ennemi à abattre. Il est absolument nécessaire à la vie et à la défense contre les agents infectieux quelle que soit leur nature.

Ces agents infectieux sont agressés, oxydés par les cellules actrices de l’immunité (nos globules blancs) qui vont les digérer (phénomène de phagocytose) puis les détruire par le biais de la production de radicaux libres sans lesquels il ne pourrait y avoir de vie organisée.

Ce n’est donc pas le radical libre lui-même qui est à l’origine du stress oxydatif pathologique, qui représente l’ennemi, mais l’excès autoentretenu et non régulé de radicaux libres.

Quel que soit notre âge, cet excès va induire, entretenir et faciliter toutes les pathologies chroniques : pathologies tissulaires, artérielles, certains diabètes, ou même dépressions, certains troubles articulaires ou autres pouvant conduire à des troubles neurologiques comme ceux de la maladie d’Alzheimer ou apparentés, maladie de Parkinson, pathologies infectieuses chroniques ou certains cancers.

Les antioxydants : une « police » contre les excès des radicaux

Les antioxydants ont pour fonction d’assurer la prévention, la protection et la régulation des excès de radicaux libres.

On en distingue habituellement deux classes correspondant à deux lignes de défense de l’organisme contre l’agression radicalaire.

  • La première ligne de défense en antioxydants :

Notre première ligne de défense est constituée d’antioxydants essentiels à la composition et au métabolisme des systèmes enzymatiques de protection.

Il existe dans l’organisme plus de 1400 enzymes répertoriées susceptibles de répondre à cette définition.

  • La seconde ligne de défense : les piégeurs de radicaux libres exogènes

En anglais, on traduit par « scavengers ». Ce terme est passé dans le langage courant de la biochimie des radicaux libres. On distingue ici deux sous-classes :

  • Les piégeurs antiperoxydants exogènes ou « scavengers vrais » : ils s’attaquent directement à l’initialisation des cycles de peroxydation.

Derrière ces appellations un peu barbares, on retrouve des éléments que nous connaissons tous. Ce sont essentiellement les vitamines C et E et la vitamine A de provenance végétale, c’est-à-dire les caroténoïdes ainsi que les flavonoïdes (vitamines P), que l’on trouve par exemple en forte concentration dans le zeste de citron.

  • Les piégeurs occasionnels et adjuvants : ils bloquent occasionnellement le métabolisme des radicaux libres au sein de certains tissus en jouant, par rapport aux cibles, le rôle de bouclier ou de paravent.

Certains parmi eux ne vous sont certainement pas étrangers. On retrouve des acides aminés soufrés (cystéine, N-acétyl cystéine, qui est en outre le précurseur de l’un des plus importants antioxydants : le glutathion…)

Également parmi ces piégeurs occasionnels, les acides aminés aromatiques (phénylalanine) indoliques (tryptophane) ou encore certains extraits organiques frais (cellules souches, acides nucléiques, ADN, ARN, certains extraits placentaires et embryonnaires à condition que toute présence de pollution ou de prions soit écartée…).

Ce qui va favoriser les excès de radicaux libres

  • Les expositions trop fortes aux rayonnements solaires vont entraîner la production en excès de radicaux libres. L’effet sera démultiplié en cas de neige, de reflet marin ou de vent. L’exposition aux radiations ionisantes, lorsque des examens radiologiques et scanners sont trop fréquemment répétés, entraîne aussi une surproduction de radicaux libres.

Il en va de même pour les xénobiotiques : ce sont des molécules totalement étrangères à la nature telles les insecticides, pesticides, les herbicides, les métaux toxiques de l’environnement (plomb, cadmium de la cigarette, mercure, arsenic, aluminium), certaines hormones, certains médicaments chimiothérapiques, ou leur métabolites prescrits au long cours dans le traitement des infections, inflammations, cancers… Hélas, une partie de ces molécules se retrouve dans pratiquement toutes les eaux de surface et dans bon nombre de nappes phréatiques.

  • Les insuffisances de régulation enzymatique jouent un rôle essentiel.

Ainsi, même si nous sommes génétiquement inégaux devant les risques liés au stress oxydant, nous pouvons, en étant attentif à notre mode de vie et d’alimentation ou en surveillant notre bilan en antioxydants, corriger au moins partiellement ces inégalités.

Les dégâts du stress oxydant sur votre organisme

Les membranes cellulaires sont les premières cibles et victimes. On parle alors de lipoperoxydation car ces membranes sont principalement constituées de lipides (graisses) et leur altération va retentir sur tout le fonctionnement de la cellule, la rendant plus ou moins sensible à l’action des agents infectieux ou hormonaux.

Puis les structures intracellulaires telles les lysosomes et mitochondries (poumons de la cellule) sont touchées elles aussi, entraînant des troubles de la respiration cellulaire pouvant conduire à sa mort en cas d’agression ou de phénomènes brutaux d’anoxie (manque d’oxygène) et de réoxygénation que l’on peut observer dans certaines pathologies ou en réanimation.

Enfin, le noyau cellulaire et les acides nucléiques qu’il contient, ADN et ARN, briques de notre code génétique, seront susceptibles d’être atteints. On observera alors des déformations bien visibles en microscopie électronique (cassures, pertes d’une partie du brin de l’hélice d’ADN…) qui seront reproduites et amplifiées tout au long de la croissance de la cellule.

C’est à ce moment là que peuvent survenir de véritables modifications de la structure tissulaire : scléroses, fragilités, inflammations chroniques, pathologies auto-immunes et vieillissements prématurés.

À ce stade, on observe aussi l’apparition ou le développement de certains phénomènes de cancérisation et de dérèglement de l’immunité.

Des manifestations supplémentaires, tels certains dépôts de pigments (lipofuschine) aggravent les conséquences pathologiques de l’oxydation et contribuent à son auto-entretien.

On les observe fréquemment dans les maladies de dégénérescence tissulaire et organique, artérielle (plaques d’athérome) et surtout du système nerveux central (maladies d’Alzheimer ou apparentées, maladie de Parkinson).

Dans tous les cas, la prévention active et volontaire, par le biais de consultations régulières, devrait nous permettre de nous alerter suffisamment tôt pour moins rouiller, « vieillir jeune » et écarter ou freiner bon nombre d’affections chroniques.

Comment intervenir activement sur notre défense antioxydante ?

Je suppose que si vous êtes là, c’est que vous n’avez pas non plus envie de grincer comme votre portail en fer forgé.

Une des clefs pour éviter de « rouiller » trop vite, c’est d’essayer de corriger les déficits nutritionnels en antioxydants capteurs de radicaux libres.

La diététique, la nutrition et la supplémentation nutritionnelle personnelle et spécifique peuvent nous aider à intervenir activement sur notre stress et nos défenses antioxydantes.

La détection et la correction précise et mesurée de certains déficits nutritionnels en antioxydants indirects, comme le zinc, le cuivre, le sélénium, les apports soufrés (N-acétylcystéine) ou les vitamines E, C, carotène et vitamine A… ne devraient pas poser de problèmes insurmontables.

Dans une lettre ultérieure, nous détaillerons les composants d’une alimentation antioxydante.

Car quelques principes de base appliqués au quotidien, facilement, sans se ruiner, permettent de stimuler efficacement nos défenses contre les radicaux libres :

  • Avoir une assiette colorée par les légumes et par les fruits.
  • Ne manger que les fruits frais de saison et si possible cultivés à proximité.
  • Assaisonner avec un maximum d’épices comme le poivre, le gingembre, ou le curcuma.
  • Ne pas hésiter à rajouter dans sa salade ou dans une soupe confectionnée soi-même du persil, de la coriandre, des épices ou même une cuillère à soupe de levure alimentaire diététique pour apporter le besoin individuel journalier en vitamines B.
  • Éviter de consommer des aliments de synthèse et ou industrialisés : plats cuisinés contenant trop de sels ou de graisses saturées, sodas, alcool fort, etc. qui sont tous des aliments oxydants.
  • Ne pas oublier que la seule boisson vraiment neutre et hydratante est l’eau de bonne qualité.

Au-delà de l’alimentation, l’évolution de la pathologie chronique nous conduit à devoir plus longtemps et plus intensément nous défendre contre les méfaits des xénobiotiques mentionnés plus haut. En conséquence, les apports jusqu’alors conseillés (doses quotidiennes recommandées) dans différentes tables à disposition du médecin et du consommateur sont, dans certaines situations personnelles et particulières, à revoir à la hausse.

Par ailleurs, notre situation personnelle et individuelle, en fonction de nos antécédents familiaux ou de certaines pathologies, peut nous conduire à être plus particulièrement et spécifiquement attentif à notre environnement : prévention de l’exposition au tabagisme actif ou passif, à la consommation même à faibles doses d’alcool ou de certains médicaments, à la pollution agricole ou à certaines situations climatiques… pour ne citer que celles-là.

On l’a vu, malgré notre vigilance, notre environnement immédiat peut nous « arroser » insidieusement de radicaux libres en excès : tabac, pollution, soleil, radiologie, certains médicaments…

Or, la spécificité génétique de certaines personnes ne leur permet pas de contrôler en permanence les réactions inflammatoires de défense et les systèmes enzymatiques de protection antiradicalaire en état de dysfonctionnement. Ils sont d’abord réversibles, puis de moins en moins, jusqu’à l’apparition de lésions organiques comme des dépôts de pigments au sein des artères, de la peau, ou du système nerveux… Ces lésions aggravent le phénomène et le rendent plus ou moins irréversible et lésionnel : infarctus, accident vasculaire cérébral ou mauvaise récupération de ces accidents.

Sur un tout autre plan, le stress psychologique prolongé et mal contrôlé est une composante incontournable de cette cascade de phénomènes pathologiques qui accélèrent le vieillissement.

Il peut être à l’origine d’une augmentation de besoin en nutriments essentiels à la défense antiradicalaire (Vitamine E ou C, zinc…).

Portez vous bien et surveillez bien votre messagerie !

Dr. Dominique Rueff



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