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L’humanité ne se lassera jamais, je pense, de se passionner pour les histoires de poitrine féminine.
Des sites Internet entiers y sont consacrés. Officiellement, ils traitent de « l’actualité des stars ». En pratique, ils publient essentiellement des photos volées de « célébrités » en bikini, en tenue légère laissant voir, soi-disant « par accident », telle ou telle partie de leur intimité.

Les sites anglais sont les meilleurs dans ce domaine, comme celui du journal à scandale Daily Mail [1].

Impossible d’y échapper si vous allez sur Internet. Même le site du journal Le Monde ou de Castorama vous mettent désormais des publicités avec photos et slogans aguichants sur ces sujets. Même si vous ne voulez pas cliquer, vous ne pouvez pas ignorer ces images qui surgissent partout.

Or, la partie de l’anatomie qui continue à fasciner le plus est… la poitrine : chacun se demande si unetelle ou, de plus en plus souvent, untel, s’est fait poser de faux seins, si le « travail » est réussi, etc, etc.

Le site Aufeminin.com, destiné aux femmes, consacre une rubrique entière aux photos « avant/après » de toutes les célébrités s’étant fait refaire la poitrine [2]. On y parle de Pamela Anderson, star de ma jeunesse aux faux seins d’une rondeur il est vrai fascinante, que sans doute les jeunes ne connaissent plus, et de centaines d’autres starlettes dont j’ignorais l’existence.

Et cet engouement semble bien justifié…

Le conte de fée grâce à la chirurgie

Une étude publiée en 2012 dans la revue « Plastic & Reconstructive Surgery » a montré que, parmi les femmes se faisant refaire la poitrine, 83 % sont plus satisfaites de leur apparence physique, 88 % se déclarent plus heureuses qu’avant, et 81 % déclarent une amélioration de leur vie sexuelle [3] !!!

Cette différence est spectaculaire. Peu d’interventions médicales peuvent se vanter d’un taux de succès aussi élevé.

Il faut noter que cet effet positif sur le niveau de bonheur est extrêmement rare. Il ne se retrouve pas avec beaucoup d’autres événements pouvant affecter la vie d’un être humain. Habituellement, tout changement positif dans la vie est rapidement assimilé, fait partie au bout de quelques mois de la normalité, et ne procure plus de joie particulière. Ainsi en est-il par exemple d’une promotion professionnelle, d’une augmentation de salaire, d’un nouvel achat et même du fait d’avoir un enfant.

Le fait en revanche de se retrouver soudain avec une poitrine opulente et rebondie, provoque un changement drastique manifestement très apprécié par les intéressées.

À tout moment, que ce soit dans la rue, au bureau, sur la plage, en discothèque, dans l’intimité ou même au supermarché, le regard de tout l’entourage change – dans le bon sens !

Décolleté provocateur, bustier, soutien-gorge pigeonnant, voire absence totale de sous-vêtement d’ailleurs, bikini mini-mini, tout devient l’occasion de s’amuser en attirant l’admiration… et le désir, avec un plaisir sans cesse renouvelé. La vie devient un conte de fée !

D’où le succès gigantesque de ces opérations : 5 à 10 millions de femmes se laissent tenter chaque année par la pose d’implants mammaires !

Tout cela est magnifique, n’est-ce pas, mais vous me connaissez trop bien, cher lecteur…

Eh oui, vous vous en doutiez, et vous aviez raison : loin d’inciter mes lectrices à participer à la fête, en leur recommandant ce raccourci vers le bonheur, je vais (encore une fois !) faire mon rabat-joie.

Mais que voulez-vous. C’est mon rôle, pas toujours drôle d’ailleurs, que de vous dire la vérité, même si elle ne fait pas plaisir à entendre…

La face sombre des implants mammaires

Malheur, trois fois malheur, mais le fait est que les opérations de reconstruction chirurgicale de la poitrine comportent de graves dangers.

Une étude de la Mayo Clinic (le plus grand hôpital des Etats-Unis) portant sur 749 femmes s’étant fait poser des implants mammaires entre 1964 et 1991 a montré que 24 % avaient connu des complications, incluant des cicatrices dures et douloureuses, des ruptures de leur implant, des hématomes et des infections [4].

Une étude menée par l’Université de Maryland a montré que 64 % des implants en silicone se rompent et fuient dans les 25 ans après avoir été posés. Les autorités de santé américaine (FDA) recommandent donc désormais de se faire retirer les implants au bout de huit ans [5], ce qui non seulement laisse souvent des cicatrices, mais entraîne aussi cette conséquence malheureuse que la femme se retrouve avec des seins encore plus plats qu’avant, puisque retirer l’implant entraîne aussi d’enlever des tissus mammaires qui se trouvaient autour.

Les allergies au silicone et le silicone qui se répand dans l’organisme peuvent entraîner de graves maladies auto-immunes : lupus érythémateux, arthrite rhumatoïde, sclérose en plaques [6].

Quant aux implants remplis de solution saline (eau salée), réputés moins allergènes, le problème est que des bactéries et des moisissures peuvent s’y développer. L’enveloppe de silicone est en effet partiellement perméable. Des bactéries dangereuses comme le staphylocoque doré ou l’E. Coli peuvent s’y implanter [7].

Les femmes en âge de procréer qui se font poser des implants mammaires pourraient s’attendre à des problèmes en cas d’allaitement. Une étude menée au Texas a montré que 64 % des femmes ayant des implants mammaires avaient trop peu de lait pour allaiter, contre 7 % habituellement. Cette étude date néanmoins de 1971 et n’a pas été confirmée depuis [8].

L’Institut National du Cancer, en France, a émis une alerte après avoir constaté un lien entre les implants mammaires et le lymphome anaplastique à grandes cellules (LAGC), une forme de cancer :

« Il existe un lien clairement établi entre la survenue de LAGC mammaire et le port d’implants mammaires », a déclaré le groupe d’experts [9].

Plus inquiétant encore, il existe malgré tout un risque de suicide douze fois plus élevé chez les femmes ayant des implants mammaires. Attention, cette hausse du risque pourrait toutefois être liée au fait que beaucoup de femmes ayant des implants mammaires se les sont fait poser à la suite d’un cancer du sein, et ont donc subi des épreuves terribles.

Pas étonnant, donc, que les implants mammaires soient régulièrement au cœur de gros scandales.

Les implants mammaires au cœur de gros scandales.

Les implants mammaires ont déjà fait l’objet de deux immenses scandales.

Le premier, dans les années 90, a mené à la condamnation des trois firmes pharmaceutiques qui les produisaient : Dow Corning Corporation, Bristol-Myers-Squibb et Baxter Healthcare Corp. Ensuite, elles ont dû payer 3,7 milliards de dollars aux femmes qui les poursuivaient pour avoir subi de graves complications.

L’autre scandale, encore tout frais surtout dans les esprits français, est celui des prothèses PIP, qui avaient été frauduleusement remplies de silicone industriel plutôt que de silicone médical. Huit femmes dont les implants s’étaient rompus sont décédées d’une forme rare de lymphome (cancer).

Mais d’autres scandales sont à venir, selon toute probabilité : en effet, depuis cent ans que la médecine pratique les implants mammaires selon différentes techniques, aucune étude sérieuse, de grande ampleur et de long terme, n’a été menée pour déterminer le risque réel lié à cette opération.

Les prothèses à solution saline, autorisées depuis 2003 aux USA et réputées comme plus sûres, n’ont fait l’objet que d’une étude sur une seule année, alors qu’on sait que la grande majorité des problèmes se posent sur le long terme (plus de huit ans).

Enfin, un fait qui ne trompe pas, et qui indique que le vent est en train de tourner : la star Victoria Beckham, la femme du footballer anglais David Beckham qui arborait des faux seins qui faisaient l’envie (et la jalousie) de millions de fans à travers le monde, a finalement annoncé en 2014 qu’elle se les était fait retirer afin, a-t-elle dit, de retrouver le charme d’une poitrine naturelle :

La star Victoria Beckham, ex-Spice girl, avant (à gauche) et après (à droite) s’être fait retirer ses faux seins en 2014.

Cette « grande nouvelle » a eu un effet immédiat en Angleterre : écroulement des nouvelles opérations d’implants mammaires : -20 % en un an !!

Espérons que son exemple aboutisse à réserver désormais la chirurgie mammaire reconstructive aux femmes victime du cancer du sein, pour qui le rapport risque/bénéfice est indiscutablement positif.

À votre santé !

Jean-Marc Dupuis



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