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Cela va peut-être vous surprendre mais je vais pour une fois prendre la défense d’une grande entreprise pharmaceutique :

Les autorités australiennes ont imposé de lourdes amendes à la société pharmaceutique Reckitt-Benckiser [1].

Elles lui reprochent d’avoir vendu de l’ibuprofène (Nurofen) dans différentes boîtes, de différentes couleurs, indiquant :

  • Nurofen douleurs de migraine
  • Nurofen céphalée de tension (mal de tête)
  • Nurofen douleurs menstruelles
  • Nurofen mal de dos
Packaging Nurofen couleur

Ces médicaments prétendument spécialisés étaient vendus plus cher que le simple Nurofen « de base ».

Or, il se trouve que ces boîtes contenaient toutes la même quantité de la même substance chimique, de l’ibuprofène lysine.

« Arnaque », « scandale », « tromperie » ont déclaré la presse, les autorités, les associations de consommateurs [2]. Et de condamner Reckitt-Benckiser à rembourser des millions de clients et à payer de lourdes amendes pour pratiques commerciales trompeuses.

Je ne doute pas que les chiens de garde aient eu raison sur le plan de la chimie. Mais ils se trompent sur le plan de la psychologie.

Oui, la présentation des médicaments est importante !

Pour un scientifique en blouse blanche, les yeux rivés sur son microscope, il peut paraître scandaleux de vendre un même produit sous différents emballages.

Mais pour le malade, ce n’est pas la même chose : la présentation des médicaments est importante.

  • On sait que les pilules de couleur marchent mieux que les pilules blanches [3]
  • Qu’injecter un médicament antidouleur à un malade est plus efficace de 50 % si un médecin en blouse blanche se tient à côté de lui à ce moment là [4]
  • Qu’une fausse injection marche mieux qu’une fausse pilule [5]
  • Que les grosses pilules marchent mieux que les petites [6]
  • Que plusieurs pilules marchent mieux qu’une, y compris si elles sont fausses (placebo) [7]
  • Qu’un médicament présenté au malade comme très coûteux marche mieux qu’un médicament présenté comme bon marché [8].

Et on peut aller encore plus loin dans le détail !

Selon l’article de The Atlantic que j’ai cité ci-dessus :

  • Les pilules bleues marchent mieux comme sédatifs (calmants)
  • Les pilules rouges et orange sont stimulantes
  • Le jaune rend les antidépresseurs plus efficaces (à cause de la couleur du soleil ?)
  • Le vert réduit l’anxiété (couleur de l’espoir ; on connaît aussi l’effet apaisant des promenades dans la nature verdoyante)
  • Le blanc apaise les douleurs
  • Si vous vous brûlez la peau, une crème rouge vous soulagera moins qu’une crème blanche.

De plus, un médicament qui porte le nom écrit dessus fonctionne mieux.

Différences culturelles

Il existe toutefois des différences selon les cultures.

Par exemple, des chercheurs ont observé que l’effet calmant du bleu ne marche pas chez les Italiens. Leur explication est que le bleu est associé dans leur esprit à leur équipe nationale de football (« gli Azzuri », les Bleus), provoquant chez eux un jet d’adrénaline !

Le jaune est réputé en Afrique être plus efficace pour les médicaments antimalaria, dans la mesure où le blanc des yeux devient jaunâtre chez les malades.

L’objectif est de soigner, pas d’avoir raison

Certains jugeront cela triste, décevant, que les malades soient si « bêtes » en cet âge de raison scientifique.

Mais l’objectif de la médecine est de soulager les patients, pas de prouver qu’elle a « raison sur le plan scientifique ». Tant mieux si l’on obtient l’effet recherché avec d’aussi inoffensifs tours de passe-passe !

Les bons médecins de famille ont tous utilisé l’effet placebo pour guérir des patients : prendre un air sérieux, froncer les sourcils, écouter soigneusement avec son stéthoscope, donner un petit bonbon qui ressemble à un médicament – et déjà le malade se sent mieux.

Tous les parents connaissent l’effet du « bisou magique » qui calme si efficacement les douleurs des enfants.

Mais comme la fessée (ou bien plus souvent la menace de fessée, outil pédagogique indispensable !), je peux témoigner d’expérience que, si vous êtes « crédible » vis-à-vis de vos enfants, vous n’avez jamais besoin de lever la main sur eux ; par contre, il faut qu’ils vous croient capable de le faire… on nous interdira peut-être bientôt la pratique du « bisou magique », pour cause d’atteinte à la vérité scientifique ?!

Enfin, je reconnais qu’il est « super gonflé » de la part de Reckitt-Benckiser de vendre plus cher un produit qui contient la même chose.

Mais que voulez-vous, là encore, c’est une question de psychologie humaine ! Je connaissais un médecin qui, à l’époque où la Sécu n’avait pas encore tout verrouillé, s’était arrangé avec le pharmacien du coin pour proposer à ses malades deux potions, une rose et une bleue.

L’une comme l’autre ne contenaient qu’un mélange d’eau, de sucre, d’acide citrique et quelques colorants naturels. Mais, selon les moyens financiers des patients, il adaptait le prix.

Si la potion était trop bon marché, elle ne marchait pas. Si elle était trop chère, c’était un poids trop lourd pour le budget du malade. Il a fonctionné comme ça pendant 44 ans, et jurait que ça marchait !

À votre santé !

Jean-Marc Dupuis



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