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Personne ne veut manger des déchets. « Manger des abats, c’est pas glamour », dirait la nouvelle génération.

C’est ainsi que l’os à moelle et les autres abats sont largement tombés dans l’oubli.

La preuve, c’est qu’il est pratiquement impossible d’en trouver au supermarché.

Votre boucher sera bien content que vous le débarrassiez des os à moelle qui s’accumulent dans son arrière-boutique. Et s’il vous fait payer, ce sera symbolique : de quoi couvrir ses charges et son temps pour découper les os.

Je vais vous dire une chose : profitez-en !

Conseil pour manger sain sans vous ruiner

Alors que les aliments de qualité sont devenus hors de prix, l’os à moelle est le dernier produit qui vous permet de manger sainement sans dépenser trop.

Il me semble en effet que le prix de l’os à moelle est nettement sous-évalué. J’attribue ça à un manque d’information du public. Et puis, beaucoup associent l’os à moelle au scandale de la vache folle, il y a 20 ans.

Malgré ce désintérêt général, une équipe de chercheurs américains a pris la peine d’inspecter de la moelle osseuse au microscope…

La moelle sert à fabriquer des cellules sanguines

Ils ont observé que la moelle connaît trois états au cours de la vie d’un individu. On pense que les moelles humaine et bovine sont assez proches structurellement.

Moelle rouge : on en trouve surtout chez les jeunes en croissance. Ce sont des usines biochimiques qui fabriquent 100 milliards de cellules sanguines par jour ! Des globules rouges pour transporter l’oxygène vers vos organes. Des globules blancs pour combattre les microbes. Des plaquettes qui assurent la coagulation de votre sang.

Moelle blanche : devenue adipeuse car elle a fini de fabriquer des cellules sanguines. Cette transformation intervient lorsque l’individu a terminé sa croissance. La moelle blanche est composée à 96 % de grosses cellules de graisse. On pense que cette graisse sert de réserve. Fait incroyable, cette moelle blanche reste capable de redevenir de la moelle rouge. C’est ce qu’on a observé en cas de leucémie ou chez les personnes qui vivent en très haute altitude [1].

Moelle grise : état fibreux irréversible. On en trouve chez les individus en fin de vie.

Au point de vue nutritif, la moelle contient surtout de la graisse, quelques protéines, mais aucune trace de glucides.

Un mets de choix dans tout le règne animal

Les animaux carnivores connaissent la valeur de la moelle. Ils rivalisent d’ingéniosité pour la récupérer. Les vautours lâchent des os d’une grande hauteur dans l’espoir qu’ils se brisent sur les rochers [2].

Faites le test avec un chien. Présentez-lui un peu de viande, un peu de foie et un peu de moelle, puis regardez ce qu’il mangera en premier…

Les hommes préhistoriques eux aussi étaient conscients du trésor caché au creux des os. On pense que l’homme a pris l’habitude de se nourrir de moelle dès l’époque où il était charognard ; c’est-à-dire qu’il se nourrissait des animaux morts qu’il trouvait. Nos ancêtres utilisaient des pierres pour fracasser les os afin d’en récupérer la moelle.

On pense que les cellules de la moelle sont comme des usines biochimiques que le corps parvient à absorber, démonter, puis recycler [3].

Comment préparer un os à moelle

L’os à moelle le plus charnu est celui du tibia de bœuf, du veau ou d’autres grands animaux.

L’état de santé de l’animal et son alimentation influencent autant la qualité de sa viande que de sa moelle épinière. L’idéal est donc de s’approvisionner chez un boucher bio [3]. Dans ces conditions, la moelle peut même se manger crue [4]. Les connaisseurs l’apprécient parce qu’elle est crémeuse et délicate – légèrement sucrée.

La recette traditionnelle de l’os à moelle est délicieuse quoique moins diététique que la moelle crue :

Il faut disposer l’os dans un plat, saler, poivrer la moelle, puis enfourner pour 45 minutes à 200°C. Pour éviter les projections de graisse brûlante, vous pouvez couvrir le plat d’une feuille d’aluminium. Souvent on étalera la moelle sur du pain grillé. On peut aussi la manger seule, avec une salade verte, cuite dans l’eau d’un pot-au-feu, ou « à la milanaise » :

Les Milanais servent une version de l’os à moelle préparé comme ragoût, « l’osso buco ». Il est braisé dans du vin blanc avec tomates, carottes et poireaux.

Gardez les os pour faire un bouillon

Une fois que vous avez extrait la substantifique moelle, ne jetez pas les os. Ils ne vous ont pas encore livré tous leurs nutriments.

Il arrive que les os aient encore un peu de viande accrochée sur l’extérieur. Idéalement, il faudrait gratter pour l’enlever.

Dans une marmite, couvrez les os avec de l’eau claire. Amenez l’eau à ébullition puis réduisez le feu pour laisser mijoter au moins 6 heures. 45 minutes avant la fin de la cuisson, vous pouvez ajouter des carottes, navets, poireaux, céleri, oignons, pour faire de votre bouillon un plat plus consistant.

Le super aliment par excellence

Les os sont riches en collagène et en minéraux, en particulier le calcium, le magnésium et le phosphore. Ils sont indispensables pour le squelette, le cœur et la santé de vos muscles.

Le collagène est essentiel à la santé des articulations, c’est la matière première du cartilage. C’est pourquoi l’on recommande à ceux qui ont des douleurs articulaires de prendre du bouillon. Vous verrez qu’il aide aussi à renforcer les ongles cassants.

Si, à température ambiante, votre bouillon se gélifie, c’est bon signe : cela veut dire que vous avez récupéré un maximum de collagène.

Pour accélérer le transfert du collagène de l’os vers le bouillon, ajoutez un peu de vinaigre de cidre de pomme. C’est efficace sans altérer le goût du bouillon.

Le bouillon contient 2 acides aminés importants : la glycine et la proline.

La glycine permet à votre corps de fabriquer du glutathion, un antioxydant très puissant qui stimule l’évacuation des polluants de notre organisme.

Ensemble, proline et glycine nous aident à produire notre propre collagène, c’est-à-dire la paroi constitutive de nos os, de notre peau, de nos artères, de nos articulations. Un apport régulier de bouillon d’os est donc un excellent moyen de ralentir l’apparition des rides, des douleurs articulaires, des maladies cardiaques ou de l’ostéoporose.

Un bol de bouillon constitue un plat excellent pour dîner léger sans risquer de troubler votre sommeil. De même pour les lendemains de fête. C’est un bon détoxifiant.

Il est aussi recommandé aux personnes atteintes du syndrome du côlon irritable, de la maladie céliaque (intolérance au gluten), de la maladie de Crohn, et pour toutes les inflammations du système digestif.

Bonne dégustation !

Eric Müller



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