Comment ne pas mourir d’amertume après avoir subi une grave injustice
Il arrive d’être victime d’injustice et d’éprouver un intense besoin de se venger mais de ne rien pouvoir faire.
On est alors submergé d’émotions violentes.
Nous imaginons que notre plus grande joie serait d’infliger mille tortures à notre ennemi.
Notre pire cauchemar, c’est de le voir rire, s’amuser, se moquer de nous !
Il ne faut pas rester dans cet état :
Une urgence médicale
En effet, cet état de désir de vengeance est désastreux pour notre santé.
Notre estomac se met à sécréter des substances corrosives.
La nuit, nous serrons les dents (bruxisme) ce qui abîme notre émail dentaire. Notre appétit diminue, notre digestion se complique. Le sommeil s’agite, la joie de vivre s’envole, la libido s’effondre.
La soif de vengeance peut aller jusqu’à l’hypertension, l’impuissance, la dépression et, dans les cas extrêmes, au cancer.
Il y a donc URGENCE MÉDICALE.
Et même s’il n’y a pas de maladie physique qui se déclenche, la personne qui a besoin de se venger mais qui ne peut rien faire, court un risque énorme de s’affaiblir, de se recroqueviller, de devenir craintive et de ne plus rien faire de sa vie, ce qui est une forme de mort intérieure terrible.
Comment sortir de cet enfer ?
Comment oublier notre “bourreau” et passer notre chemin, surtout s’il faut en plus accepter que “justice ne soit pas faite” ?
Etape n°1 : renoncer à croire qu’on peut “faire comprendre” à l’agresseur qu’il a mal agi
Ayant été agressé injustement, le premier réflexe est de vouloir s’expliquer avec son ennemi.
Lui faire comprendre qu’il a mal agi. Qu’il nous a fait mal. Que c’est vraiment méchant, et qu’il ne devrait pas recommencer.
A ce stade, je dis : “Attention, grand danger !”
A partir du moment où la personne en face de vous est au courant que vous souffrez à cause d’elle, et que manifestement cela ne la fait pas changer, qu’elle ne vient pas s’excuser ni réparer ni chercher la moindre solution, que peut-être même elle redouble d’agressivité contre vous, il faut avoir le courage d’envisager que vous faire souffrir fait peut-être partie de ses objectifs.
Si tel est le cas, il ne faut surtout pas lui expliquer pourquoi, comment elle vous a fait mal.
Car elle pourrait s’emparer de ces informations précieuses et s’en servir contre vous. Si vous lui dites où elle vous fait souffrir, vous lui donnez la clé pour vous faire encore plus mal, et il y a fort à craindre qu’elle va s’en servir.
En l’absence, d’une démarche sincère de demande de pardon et de réparation, de volonté réelle de réconciliation, n’essayez pas d’expliquer à votre ennemi qu’il ne devrait pas vous maltraiter.
Acceptez, même si c’est dur, que vous avez un ennemi qui vous veut du mal. Il est très important d’apprendre à vivre avec cette certitude.
Cette première étape est longue, elle peut prendre des mois ou des années, car elle implique de reconnaître qu’il y a une part sombre dans l’Homme, ce qui difficile et douloureux, surtout pour les personnes bienveillantes qui n’éprouvent pas de sentiments mauvais pour les autres.
Ce travail d’acceptation ne sera jamais entièrement terminé, car le besoin de s’expliquer chez la victime viendra souvent la revisiter. Chaque fois, ce sera une lutte, pour se convaincre que cela ne sert à rien, et que cela ne peut qu’empirer les choses.
Il y a là un véritable deuil à faire, le deuil de l’image idéalisée que l’on se faisait de l’autre, et de l’Homme en général, où l’on imaginait qu’une telle méchanceté “n’était pas possible”.
Eh bien si, malheureusement, s’il y a bien une chose que l’Histoire nous enseigne, c’est que non seulement la méchanceté est possible, mais qu’elle ne semble avoir aucune limite.
Etape n°2 : essayer de ne plus éprouver de joie quand il arrive des malheurs à votre ennemi
La seconde étape est d’essayer de réduire notre sentiment de joie quand il arrive des malheurs à notre ennemi.
C’est une étape très importante de la libération émotionnelle.
Cas pratique :
Une femme bienveillante, fidèle, pleine de qualités, s’étant sacrifiée toute sa vie pour un mari égoïste et méchant, qu’elle s’est pourtant efforcée d’aimer et de pardonner en toutes occasions.
Un jour, le mari la quitte pour une autre, quinze ans plus jeune. Lors de la procédure de divorce, il multiplie les accusations fantaisistes contre sa première femme, prenant un plaisir visible à l’humilier pour la laisser sans le sous et lui faire porter la culpabilité. Par la suite, il s’amusera à poster sur Facebook des images radieuses montrant sa vie formidable avec sa nouvelle femme, pour accroître ses souffrances.
Pour la femme trahie, il est extrêmement difficile de ne pas éprouver une envie viscérale de se venger.
De tout son cœur, elle espère que les choses tourneront mal, le plus vite possible, avec la jeunette. Et à chaque “bonne nouvelle” – naissance, vacances réussies, achat de nouvelle maison, nouvelle voiture – est comme un poignard dans son cœur.
Il est impossible que cette femme cesse de souffrir alors qu’elle entend que son ex-mari vit la belle vie avec sa nouvelle femme.
Ce n’est donc pas par là qu’il faut commencer.
Mais il y a malgré tout quelque chose de très important à faire :
Il s’agit de travailler à éprouver moins de joie quand il arrive des malheurs à son ex-mari.
C’est là qu’elle peut engager le travail de libération émotionnelle, par exemple en se faisant les réflexions suivantes :
“ J’ai envie d’être heureuse, mais je veux un bonheur vrai, qui ne soit pas uniquement la joie malsaine que cela aille mal dans la vie de mon ex-mari. Je ne veux donc pas me contenter d’attendre qu’il lui arrive des malheurs, surtout que je sais que cela ne me provoque qu’une joie de courte durée. J’éviterai de me complaire là-dedans, je me détournerai au plus vite, j’essaierai d’oublier cette joie pour retourner à mes occupations positives, qui m’apportent un authentique bonheur durable.”
Ce n’est que dans un second temps qu’elle parviendra aussi à éprouver moins de peine quand son mari reviendra la narguer avec ses « succès ».
Cependant, on s’en doute, cette stratégie ne suffit pas. Ce n’est qu’un premier pas. Un pansement d’urgence.
Pour se débarrasser véritablement de l’envie de vengeance qui nous enchaîne, il faut engager un traitement de fond.
C’est ce que nous allons voir maintenant :
Etape n°3 : comprendre que la personne qui nous a trahi n’a pas “gagné”
Reprenons l’histoire de cette femme.
Epouse modèle, elle a donc été humiliée, trompée, spoliée par son ex-mari.
Ce qui est évidemment horrible pour elle.
Mais faisons un pas de côté et essayons de juger de sa situation, maintenant.
Puisqu’elle était si bonne avec son mari, et lui si ingrat avec elle… Qui a gagné et qui a perdu dans l’affaire ?
- Le mari a perdu une femme qui lui voulait du bien
- La femme a perdu un mari exploiteur.
La réponse est évidente : c’est le mari qui a perdu. Sa trahison l’a privé d’une situation qui était avantageuse pour lui.
En la quittant, le mari s’est tiré une balle dans le pied. Il a perdu sa meilleure alliée. Bien sûr, il espère que sa nouvelle femme sera aussi bonne avec lui que la première. Mais rien n’est moins sûr, surtout si la première était exceptionnellement dévouée et patiente, comme elle semblait l’être.
Bien plus, cette tendance à nuire à sa propre bienfaitrice indique chez lui un grave manque de jugement. Dans la vie, il n’est pas si courant de rencontrer des personnes qui vous veulent du bien. S’il a été assez bête pour maltraiter sa première femme, au point de se priver de sa douceur et de sa patience, il y a toute probabilité qu’il fasse la même chose avec la prochaine, et d’ailleurs avec tout le monde. C’est donc un homme qui ne sait pas reconnaître ses alliés ! Pire, c’est un homme qui transforme ses meilleurs amis en ennemis.
Or, une personne assez folle pour s’aliéner les (rares) personnes qui lui veulent du bien finit forcément en catastrophe.
Le mari s’est puni lui-même. L’épouse trahie n’a pas besoin de chercher à se venger en plus, il s’en charge déjà tout seul !!
Un très long chemin
Une fois que la personne qui était rongée par le désir de vengeance parvient à :
- Renoncer au besoin d’aller expliquer à son ennemi qu’il lui a fait mal ;
- Contenir la joie qu’elle éprouve quand il arrive malheur à son ennemi ;
- Comprendre que, dans les cas de trahison, c’est toujours le traître qui perd le plus, puisqu’il se prive du soutien d’une personne bienveillante,
Eh bien, une fois qu’elle a compris cela, ce qui est long et difficile, le travail n’est pas terminé.
En effet, le désir de justice en nous est si fort qu’il est très difficile de l’éteindre, tant que justice n’a pas été rendue officiellement, publiquement. Bref, tant que le méchant dans James Bond n’a pas été dévoré par les requins.
On peut maîtriser ce désir de vengeance, mais il va revenir se manifester régulièrement.
Chaque fois, il faudra se refaire tout le raisonnement, de A à Z, pour s’apaiser.
Le raisonnement, qui est dans la tête, met beaucoup de temps à “descendre” au fond de nous-même, dans nos tripes. Ce n’est que lorsque nous l’aurons complètement intégré, lorsqu’il nous paraîtra évident que c’est celui qui a trahi qui est le perdant, qu’on commence à aller mieux.
Ce qui peut prendre, des années.
Mais il y a heureusement, une voie de sortie qui peut se présenter à nous.
Une voie très étonnante, mais, pour la comprendre, je vous demande d’avance d’être très ouvert d’esprit.
Etape n’°4 : une voie de sortie pour se libérer plus vite
Il est courant, quand on ressasse des envies de vengeance, d’en appeler à une sorte de “justice céleste”, même si on n’y croit pas.
On espère que, malgré tout, il va se “passer quelque chose”.
Que le “Ciel” ne restera pas silencieux. Que le méchant ne restera pas impuni même si, selon toutes les apparences, il ne va pas payer pour ses crimes ici-bas.
Bref, allons droit au but, on se surprend à espérer, avec la naïveté d’un enfant, que l’enfer existe malgré tout, rien que pour le plaisir d’y voir rôtir l’autre personne !
Ces moments là sont extrêmement intéressants, et utiles sur le plan psychologique. Ils sont l’occasion de se libérer totalement.
En effet, ils sont une excellente occasion de se poser la question, très sérieusement, de savoir si, vraiment, nous aurions intérêt à ce que l’enfer existe.
Car, si l’enfer existe, sommes-nous absolument certain que seule l’autre personne s’y retrouvera ?
Autrement dit, sommes-nous absolument sûr que nous n’avons, de notre côté, jamais rien fait qui risquerait, ne serait-ce que sur un malentendu, de nous y conduire nous aussi ??
Ce qui change brutalement le tableau. Cela nous fait revenir sur la scène. Soudain, on parvient enfin à détourner le regard de notre ennemi, pour s’interroger sur soi, sur ce que l’on est en train de faire de notre propre vie.
On recommence enfin à être capable de réfléchir à nos propres torts éventuels, et plus uniquement à ceux de l’autre.
Je ne parle pas de nos torts dans cette dispute particulière. Il ne s’agit bien sûr pas de chercher chez la pauvre épouse trahie une quelconque responsabilité dans la méchanceté de son mari.
Non, je parle d’autres occasions dans notre vie, en dehors de ce conflit particulier. La question est : n’avons-nous par ailleurs absolument rien à nous reprocher ? N’y a-t-il pas d’autres situations où nous n’aurions pas été une victime innocente, et où nous aurions fait du tort, directement ou indirectement, à d’autres personnes ?
Une personne qui pourrait souffrir comme nous souffrons actuellement du tort qu’un autre nous a fait ?
Le fait d’ouvrir les yeux sur une autre réalité, la nôtre, qui seule nous concerne réellement, nous libère.
On se rend compte qu’on a perdu son temps à vouloir se venger. Que cette personne qui nous a trahi n’est qu’un cas parmi tous les êtres malfaisants qui existent, et qu’il est vraiment stupide et inutile de tout arrêter pour elle. On réalise qu’on s’est soi-même imposé un esclavage en faisant dépendre notre bonheur de son malheur, et vice versa.
C’est en réalisant cela que l’on sort de l’hypnose, on pourrait même dire de l’ensorcellement, de la vengeance.
C’est comme si les écailles nous tombaient des yeux. Soudain, on a l’impression de voir à nouveau.
On se rend compte qu’il y a des tas de choses à faire dans notre propre vie, que nous avions délaissées, et que c’est là que se trouve la véritable urgence.
Etape n°5 : La suprême récompense
Et c’est là qu’il arrive de recevoir la suprême récompense.
Cette suprême récompense, c’est de comprendre que cette personne qui nous avait “trahi” nous a en fait rendu service.
En nous révélant la vérité sur la relation malsaine que nous avions avec elle, elle nous a libéré, elle nous a donné la possibilité de vivre enfin notre propre vocation, et nous détacher d’elle.
Le fait qu’elle souffre, qu’elle paye, devient alors secondaire. Cela devient même, un jour, dérisoire.
Peu à peu, notre ennemi se présente moins souvent à notre conscience. Jusqu’au jour où l’on arrivera à éprouver des bouffées de joie et de reconnaissance en pensant à lui.
J’exagère ?
A peine. Ces bouffées de joie et de reconnaissance ne seront sans doute jamais constantes, ni même fréquentes. Mais elles peuvent se produire au moins de façon fugitive, cela arrive plus souvent qu’on ne le pense.
L’espace d’un instant, on entrevoit que, malgré toutes les blessures que notre ennemi nous a infligées, il a aussi contribué à nous révéler quelque chose de profondément positif, que très probablement nous n’aurions jamais découvert sans lui.
Encore une fois, je ne veux pas donner l’impression d’une naïveté ridicule, en prétendant que l’on peut bondir de joie en pensant aux trahisons.
L’idéal serait évidemment un monde où les traîtres seraient punis, et où leurs victimes n’auraient pas à se consumer des années en méditant une vengeance impossible.
Mais mon message est que, dans la nuit de la souffrance, il est possible de retrouver des éclairs de lumière et même de joie, et d’éviter de se rendre malade ou de mourir de tristesse.
Même si le chemin est compliqué, j’espère avoir un peu contribué à le défricher. N’hésitez pas à m’aider, et à aider les autres lecteurs de SNI, à aller plus loin, en partageant vos réflexions et éventuelles expériences, positives ou négatives, dans ce domaine.
A votre santé !
Jean-Marc
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