Comment protéger l’environnement avec notre mode vie actuel ?
On nous dit que partout dans le monde, les enfants se mobilisent pour la transition écologique.
Ils font grève à l’école, ils défilent dans les rues. Ils demandent aux politiciens d’agir !
Cela fait plaisir de voir une génération qui s’empare ainsi de son destin.
Maintenant, nous qui avons connu le temps où l’on ne gaspillait et ne consommait pas autant, peut-être devrions-nous leur raconter la vraie vie traditionnelle. Celle où on ne prenait pas plus à la terre que ce qu’elle pouvait donner.
Celle qui respectait vraiment la nature, sans énergie nucléaire, sans milliards de barils de pétrole brûlés chaque année, sans marées d’automobiles, sans pollution lumineuse, sans intérieurs surchauffés, sans hypermarchés ni objets en tout genre importés à bas prix de Chine, et sans Internet.
Le modèle idéal du recyclage intégral : la ferme française en 1950
Ceux d’entre nous qui ont connu les années 1950 se souviennent du modèle de base de la famille française traditionnelle.
Cette famille vivait dans une ferme, quasiment en circuit fermé. Elle ne gaspillait, pour ainsi dire, rien.
Quand, par chance, on pouvait s’abonner à un journal qui arrivait par la Poste une fois par mois, on le lisait, puis on le découpait soigneusement en rectangles pour servir de papier toilette, toilettes qui se trouvaient, bien entendu, à l’extérieur, sans chasse d’eau, sans chauffage, au-dessus du tas de fumier.
Si on avait de la chance, on avait une fontaine pour l’eau. Sinon, c’était le puits, d’où il fallait tirer de l’eau dans un lourd seau en bois, avec une poulie et une manivelle qui grinçait.
On vivait dans une seule pièce avec le poêle, le lit, la table, une petite fenêtre pour éviter de gaspiller de la chaleur. Ce poêle était en général éteint, même en hiver, puisqu’on préférait se contenter de chauffer l’atmosphère avec le bétail qui vivait en dessous ou à côté, ou bien se tenir chaud les uns contre les autres. Toute la famille couchait dans le même lit.
Il fallait supporter les odeurs intenses de la basse-cour, de la fosse à purin et, bien sûr, les bestioles en tout genre qui proliféraient dans le fumier, les lits, la nourriture…
Il n’y avait, bien entendu, pas de lave-linge, encore moins de lave-vaisselle. Les enfants mettaient du papier journal au fond de leurs chaussures pour les adapter à leur pointure. Le soir, on rapiéçait les habits, on tricotait ; il n’était pas question de jouer à la Game Boy, ni d’acheter des habits à la Halle aux Vêtements ou aux Chaussures, qui n’existaient pas de toute façon.
Pendant les « vacances », on n’allait pas à la piscine ni faire des stages de kayak, de ski ou de parapente. Si l’école s’arrêtait, c’était pour permettre aux enfants (dès l’âge de 6 ans) de participer aux travaux des champs qui commençaient à 4 heures du matin et se terminaient à 22 heures, tous les jours. C’est sans doute une explication, d’ailleurs, du fait qu’on parvenait à dormir très bien sur un lit de paille avec de la vermine qui venait vous piquer pendant la nuit : quand on se couchait, on était vraiment fatigué.
Je sais que mes propos vont énerver. Qu’on va m’accuser encore une fois de faire mon « père la morale » qui agite son index menaçant, en expliquant aux jeunes qu’ils ne connaissent rien à la vie.
Ce que j’explique à mes enfants sur la transition écologique
Dans le discours sur la transition écologique, on explique aux enfants qu’ils peuvent avoir le beurre et l’argent du beurre : cesser de polluer tout en vivant dans un monde hyper-technologique, riche, sans sacrifier leur niveau de vie, en remplaçant les voitures à essence par des voitures électriques, peut-être même des voitures volantes, en vivant dans des maisons à zéro consommation d’énergie, mais malgré tout ultra-modernes avec tout le confort auquel ils sont habitués et, bien sûr, en continuant à partir en vacances à tout bout de champ, sans doute dans des avions à énergie solaire, et à manger des tomates, des poivrons, des courgettes en plein hiver et, bien sûr, de la viande tous les jours.
C’est peut-être vrai. Mais peut-être pas.
Ma conviction est qu’on ne protégera pas l’environnement tout en continuant à vivre comme aujourd’hui.
Il va falloir faire des sacrifices, des vrais.
Bien sûr, cela ne viendra pas d’un coup. Le changement sera progressif. Il y a des progrès qui vont demeurer, comme, j’imagine, certaines opérations chirurgicales très importantes, certains moyens de transport, certaines machines qui facilitent tellement la production de biens.
Néanmoins, il va falloir apprendre très vite, je suppose, à:
- vivre sans les mille et un objets en plastique que nous achetons, cassons et jetons quotidiennement (couverts en plastique, sacs plastique, gadgets, accessoires, jouets en tout genre) ;
- cesser de circuler dans tous les sens : vivre et travailler chez soi ou à côté de chez soi, rester en vacances à la maison pour travailler, en particulier au jardin pour cultiver des légumes et préparer de la nourriture pour l’hiver (vers 1995, je me souviens d’une vieille dame que j’avais rencontrée dans un village du Pas-de-Calais, situé à 15 km de la côte : elle n’avait jamais vu la mer de toute sa vie, elle n’en avait pas eu le loisir) ;
- remplacer les loisirs, les activités sportives « ludiques » par des activités productives, agricoles ou artisanales, afin de limiter notre dépendance aux importations bien pratiques mais terriblement polluantes et gourmandes en énergie ;
- recréer des liens sociaux localement : voisinage, solidarité de quartier, pour ne plus dépendre de systèmes de solidarité gérés par l’État mais impliquant une bureaucratie et des moyens humains et financiers énormes ;
- réapprendre à se nourrir sobrement, avec des produits locaux, de saison ; ce qui implique de se contenter l’hiver bien souvent d’une potée au chou et aux carottes, avec un bout de lard les jours de fête ;
- renoncer à des traitements médicaux ruineux, comme ces chimiothérapies anticancéreuses qui coûtent jusqu’à 100 000 euros pour prolonger la vie de quelques mois, pour revenir à des remèdes simples, naturels, peu coûteux ;
- se laver avec parcimonie, avec un gant de toilette, dans une cuvette d’eau tiède, plutôt que par des bains ou des douches brûlants de 300 litres quotidiennement ;
- se vêtir avec des habits solides, durables, en laine, en cuir, en coton, plutôt qu’à la dernière mode avec des textiles synthétiques, chatoyants, produisant des microfibres polluantes ;
- s’éclairer uniquement quand c’est nécessaire ;
- mieux que le « recyclage », qui nécessite une importante dépense d’énergie pour la collecte, le traitement et la fabrication de nouveaux objets, revenir à des objets qui se réparent quand ils sont cassés : vêtements qui se rapiècent, machines et outils qui s’aiguisent, se soudent, dont on ne change qu’une partie, meubles qui se rafistolent, etc. ;
- se contenter, pour ses distractions, de lire des livres de qualité. Constituer une bibliothèque qu’on se passera d’une génération à l’autre, en n’y ajoutant de nouveaux livres que lorsque cela en vaudra vraiment la peine, pour cesser d’alimenter « l’industrie du loisir », les parcs d’attraction et même les « succès de librairie » purement commerciaux qui font tourner Amazon, Fedex et DHL, sans apporter une once de sagesse supplémentaire à l’humanité.
Apprendre, enfin, à se contenter de vivre de ce qu’on a. Prendre plaisir à passer une après-midi à ramasser des herbes sauvages pour une bonne soupe, par exemple.
Je vous donne la recette d’Émilie Carles* :
« Ça, c’est du plantain et voilà de l’oseille sauvage, de la drouille, de l’ortie ou barbe-à-bouc, du pissenlit, de la doucette, un petit chardon des champs ou chonzio, une plante laiteuse, le laichuron, de la mille-feuille, du chalabrei aux feuilles largement dentelées, de la tétragone ou épinard sauvage, de la langue bogne, une feuille de sauge et un brin de ciboulette. À cela j’ajoute une pointe d’ail, quelques pommes de terre ou une poignée de riz et j’obtiens une soupe onctueuse et délicieuse. Pour la réussir, ce qui importe, c’est de respecter les proportions. Il faut très peu d’herbes de chaque sorte afin qu’aucune ne l’emporte sur les autres. »
Quel beau projet pour une activité scolaire sur la « transition écologique » !
Mais y aura-t-il autant de candidats que pour les manifestations dans les rues ?
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
*Il faut faire lire aux enfants Une soupe aux herbes sauvages, d’Émilie Carles, qui raconte son enfance dans les vallées reculées des Alpes.
La nuit de sa naissance, explique-t-elle, il se trouve que la vache (l’unique vache, bien sûr) de la famille a aussi dû donner naissance à un veau.
Malgré l’accouchement de sa femme qui s’annonçait compliqué, son père préféra se rendre à l’étable pour aider la vache à vêler. Il fallait en priorité sauver la vache, sinon c’est toute la famille qui serait morte de faim l’hiver suivant. Sa mère survécut à l’accouchement, mais mourut foudroyée dans un champ quand Émilie avait 4 ans, la laissant orpheline avec ses cinq frères et sœurs.
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