Manquez-vous d’hormone du bonheur ?
J’ai parcouru le nouveau livre de Michel Houellebecq, Sérotonine, et je ne vous le recommande pas !!
Plus précisément, je vous recommande de ne pas l’acheter…
C’est l’histoire d’un homme désespéré qui surmonte son mal-être à coup de Captorix, un antidépresseur imaginaire qui stimule la sécrétion de sérotonine. La sérotonine est un neurotransmetteur parfois aussi appelé « hormone du bonheur ». On a cru un temps que les dépressifs en manquaient. Cette théorie est aujourd’hui discréditée (j’y reviens plus loin).
Ce livre décrit tout ce qu’il y a d’affreux dans notre époque, d’une façon qui me paraît sadique.
Ça ne sert à rien. C’est mauvais pour le moral. Et c’est trop facile.
La vie a toujours été dure
Tuer l’espoir dans l’esprit des autres, c’est trop facile.
Quel espoir pour l’esclave qui travaillait à construire des pyramides il y a 4 000 ans, à l’époque des pharaons ? Quel espoir pour l’Inuit qui luttait toute sa vie contre la faim et le froid dans le Grand Nord ? Quel espoir pour l’Italien qui vivait au moment de la grande peste, au 14e siècle, et qui voyait mourir les deux tiers de ses compatriotes autour de lui ?
À toutes les époques, à tous les étages de la société, les hommes sont condamnés à rencontrer la douleur, l’échec, l’injustice, puis la maladie et la mort. Le monde est ainsi fait, et ce ne serait pas intéressant si cela s’arrêtait là.
Là où les choses deviennent intéressantes, étonnantes, fascinantes même, c’est que, justement, l’homme ne désespère pas ou, du moins, pas toujours !
- Ce n’est pas le fait que certaines personnes boivent, qui est étonnant. Ce sont toutes les personnes qui ne boivent pas !
- Ce n’est pas le fait que certaines personnes volent, qui est étonnant. Ce sont toutes celles qui ne volent pas !
- Ce n’est pas le fait que certaines personnes trompent, qui est étonnant. Ce sont toutes celles qui ne trompent pas les autres !!
Et elles représentent, il faut le rappeler, l’immense majorité !
On ne peut pas prétendre comprendre le monde si on ne tient pas compte de ce fait merveilleux, mais si courant qu’on finit par l’oublier, que l’homme ait une telle force de vie qui l’anime et le pousse à essayer de bâtir, plutôt que de détruire.
Même s’il y a beaucoup de souffrance en France aujourd’hui, et beaucoup de raisons de vouloir prendre du « Captorix », la grande majorité des gens continue à se lever tôt et à contribuer positivement à la société.
Quelle est cette force mystérieuse qui amène quelqu’un à reconstruire sa maison après la tempête qui a tout ravagé ? Pourquoi s’obstine-t-il à bâtir alors qu’il sait que le temps finira par tout détruire ? Pourquoi veut-il apprendre, s’améliorer, alors qu’il sait qu’il va mourir ? Pourquoi veut-il aimer alors qu’un jour, tout sera oublié ?
Cette petite flamme qui ne s’éteint jamais
Cette petite flamme qui ne s’éteint jamais, d’où vient-elle ? Comment fonctionne-t-elle ?
C’est ça qu’on voudrait savoir.
Est-ce la sérotonine ? Ou un autre produit chimique (neurotransmetteur) qui agirait dans notre cerveau pour nous procurer du bonheur, de l’espoir ?
Quand les psychiatres prescrivent des « inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine » (ISRS), ils établissent souvent une analogie avec les diabétiques, qui manquent d’insuline :
« Les diabétiques manquent d’insuline. Ils doivent donc prendre de l’insuline pour se soigner. Eh bien, c’est la même chose pour vous, qui faites une dépression ! Vous manquez de sérotonine, vous devez prendre des médicaments pour élever votre taux de sérotonine ! »
C’est ainsi qu’ils prescrivent Prozac, Deroxat, Divarius, Paxil, Zoloft, Seropram, Celexa, Seroplex, Cipralex, Priligy, Floxyfral ou encore Norset.
Cette simplification est très pratique, et permet de satisfaire tout le monde.
Mais ce n’est pas du tout aussi simple. Les médecins n’ont, en fait, pas d’explication sur l’efficacité de ces médicaments.
« S’il fallait être honnête (et, rassurez-vous, je le suis le plus souvent…), nous dirions avant tout à nos patients que le mécanisme d’action de nos médicaments reste aujourd’hui très mystérieux, que les causes réelles de la dépression sont encore largement méconnues, en tout cas multiples et très complexes, et que la sérotonine n’est sûrement pas l’hormone du bonheur », expliquait le Pr Antoine Périssol, professeur de psychiatrie à l’Inserm, le 6 janvier 2019. [1]
Tout ce que les médecins ignorent sur la sérotonine
Tous les efforts pour trouver une relation entre la quantité de sérotonine dans le cerveau et l’état moral du patient ont échoué. Certaines personnes ont beaucoup de sérotonine, et sont déprimées. D’autres en ont peu, et ont un excellent moral.
Il n’y a donc pas de lien entre votre taux de sérotonine et votre risque de dépression.
Le rôle de la sérotonine n’est pas compris par la Science. On sait qu’elle ne se limite pas à faire fonctionner les synapses. Elle se fixe sur au moins treize récepteurs différents dans le cerveau, intervenant dans de multiples systèmes. Elle n’intervient pas seulement sur les émotions, mais aussi sur la température, le sommeil, la sexualité, l’alimentation.
Et ses effets aussi sont très complexes !
« La sérotonine peut produire des effets quasiment inverses selon la zone cérébrale où elle se trouve », explique le Pr Périssol. Il est complètement illusoire de penser qu’on puisse influencer à loisir l’état d’esprit de quelqu’un en changeant simplement sa quantité de sérotonine.
De plus, la sérotonine interagit avec les autres neurotransmetteurs, qui lui font concurrence. Si vous manquez de l’un, d’autres peuvent compenser, comme la dopamine ou le GABA, par exemple.
Aujourd’hui, on constate que les personnes gravement dépressives vont parfois mieux grâce aux antidépresseurs ISRS. On sait que, en cas de risque suicidaire, mieux vaut prendre des antidépresseurs ISRS que de rester dans son état.
Mais tout le reste est mystérieux. Le mystère de la vie, et de l’énergie vitale, n’a pas encore été percé !!
Alors, quelle est la vraie cause de la dépression ?
Par contre, on sait que la dépression est causée :
- probablement par des facteurs génétiques et/ou physiologiques, dont peut-être des problèmes de sérotonine, sans certitude ;
- et elle est certainement causée par d’autres facteurs : la personnalité, l’histoire, la culture, la représentation de soi et du monde, le stress quotidien, les événements de la vie.
On sait que plus une société se modernise, plus elle compte de dépressifs [2]. Et le phénomène est massif. Il semble même s’emballer avec le temps. Ainsi, le nombre de dépressifs a augmenté de 18 % ces dix dernières années, touchant 300 millions de personnes dans le monde [3] !!!
En France, le Bulletin épidémiologique hebdomadaire du mardi 16 octobre 2018 a annoncé une hausse de 30 % de la dépression depuis 2010. C’est monstrueux.
En Belgique, le nombre de dépressions et de burn-out a triplé entre 2007 et 2015 [4] !!!
Pire, entre 2010 et 2015, le nombre de suicides chez les adolescents a bondi de 31 % [5].
J’ai abordé dans des lettres précédentes les causes nombreuses de ce phénomène : usage excessif des écrans, solitude, divorce, mauvais équilibre alimentaire, pollution chimique et sonore, ambiance de fin du monde créée par les médias, perte de sens face à l’existence…
Que faire pour retrouver du sens à sa vie ? J’avais recommandé la lecture des Quatre accords toltèques, excellent petit livre de sagesse, et je peux encore en recommander un autre qui va beaucoup plus loin : Douze règles pour une vie. Un antidote au chaos, qui vient de sortir en librairie.
C’est un livre qui rappelle les règles simples qui aident à vivre et qui, bizarrement, ne sont pratiquement plus jamais rappelées dans les écoles, ni même dans les familles.
Par exemple, qu’on ne peut pas remettre le monde d’aplomb si on n’arrive déjà pas à ranger sa chambre (!!). Qu’il vaut mieux manger et se coucher à heure fixe pour retrouver un équilibre. Qu’il faut faire très attention aux mensonges, car quand on commence à mentir, on se retrouve en général obligé de faire un autre mensonge pour couvrir le premier, puis un autre, puis un autre, jusqu’à ce que de graves problèmes nous tombent dessus, comme dans la vie de Pinocchio.
Etc.
Cela paraît tout simple, mais pour moi ce livre est l’exact contraire de Sérotonine. Vous en finissez la lecture plus confiant, plus heureux, avec beaucoup plus d’espoir dans le cœur. Ce qui, en ce moment, est rare et précieux.
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
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