Conseils nutritionnels pour les carnivores
La viande rouge est accusée de provoquer le cancer colorectal (cancer de l’intestin) et bien d’autres maladies encore. [1] Selon une étude scientifique, 6000 cancers seraient évités chaque année en France si l’on mangeait moins de viande rouge.
Dans la catégorie viande rouge, on trouve le bœuf, le porc, le veau, l’agneau, la charcuterie. En effet, il s’agit d’une classification par des nutritionnistes, non par des cuisiniers qui considèrent, eux, que le porc et le veau sont des viandes blanches.
Cependant, cette étude est contestée de mille façons.
La principale est que ce n’est pas la viande rouge en soi qui est mauvaise pour la santé, mais la mauvaise viande rouge, mal cuisinée.
Autrement dit, la viande d’animaux élevés en batterie, à la lumière électrique, gavés de soja et de maïs :
Où trouver de la bonne viande ?
Certains privilégiés peuvent encore élever leurs propres animaux, et ont ainsi la garantie de ne manger que de la viande de qualité.
Il existe aussi des exceptions comme le dirigeant de Facebook Mark Zuckerberg, qui ne mange que la viande de gibier sauvage, qu’il a “personnellement chassé”.
“Je ne mange que la viande que je tue moi-même”, a-t-il déclaré à la presse. [2]
Pour nous autres, qui ne chassons pas, l’alternative est d’acheter de la viande de “broutard”, dans les rares boucheries qui en vendent.
Le broutard est l’animal élevé en pâturages, qui n’a brouté que de l’herbe. Il faut insister auprès du boucher pour qu’il garantisse que sa viande vient d’une bête qui n’a pas été engraissée de façon industrielle. Après, c’est une question de confiance car à l’œil nu il est impossible pour un non-spécialiste de faire la différence.
Pour avoir parlé avec des professionnels du secteur, il est même très difficile de juger de l’état de santé d’une bête une fois qu’elle a été tuée, écorchée, vidée et suspendue à un crochet. Alors, lorsqu’elle est en barquette dans un rayon ou même dans la vitrine d’un boucher, cela devient très compliqué et c’est pourquoi il est si important que des filières d’excellence existent pour la sécurité des consommateurs.
Pour éviter toute confusion, rappelons que les veaux que vous voyez dans les prés le long des autoroutes et des voies de chemin de fer ne sont en général pas destinés à faire de la viande de broutard.
Même s’ils ont commencé leur existence dans de jolis enclos, ils sont pour la plupart envoyés dès l’âge de neuf mois dans des batteries pour les engraisser aux céréales et granulés jusqu’à l’abattage.
Choix des morceaux
D’un point de vue nutritionnel, on ne mettra pas non plus tous les morceaux sur le même plan.
Aujourd’hui, la mode est à manger du pur muscle. On se méfie de la graisse. On est dégoûté par les abats, les cartilages, les “bas morceaux” riches en gelée. Les os à moëlle sont pour les chiens, et les autres os vont à la poubelle.
Ce n’était pas le cas autrefois.
Au long de l’évolution, les êtres humains ne mangeaient pas que le muscle. Au contraire, ils appréciaient les organes, riches en vitamines A et B, en fer et en acides gras.
Les organes sont beaucoup plus pauvres que les muscles en méthionine, un acide aminé. Des études sur les animaux indiquent que manger moins de méthionine a de nombreux bienfaits pour la santé et augmente la longévité. [3]
Ils se délectaient de la moëlle des os, et, jusqu’à la génération de nos grands-mères, personne n’aurait eu l’idée de jeter des os à la poubelle avant de les avoir fait bouillir pour en extraire les bons nutriments dans un bouillon.
Les personnes qui mangent souvent de la viande, et ne consomment que le muscle risquent de souffrir d’un excès de fer. La viande rouge est en effet très riche en fer hémique, très assimilable. Le fer est nécessaire à la vie (il est indispensable pour le transport de l’oxygène dans le sang, dans l’hémoglobine), mais en excès il est très oxydant et déclenche la production de radicaux libres cancérigènes.
Les personnes en surcharge de fer doivent pratiquer le don du sang.
Préparer la viande
Ce n’est pas tout d’acheter de la viande de qualité et de choisir les bons morceaux, vous gaspillerez votre argent si vous ne préparez pas la viande correctement.
Car la meilleure des viandes deviendra cancérigène si elle est mal cuite.
La cuisson au barbecue, les grillades, la friture, et d’une façon générale les hautes températures, produisent des molécules toxiques et cancérigènes : amines hétérocycliques, produits de glycation avancés et hydrocarbones aromatiques polycycliques (HCAs).
La cuisson à la vapeur, à basse température (moins de 100 °C au four) ou le pochage (dans l’eau chaude) sont beaucoup plus sains.
Si vous choisissez un mode de cuisson à haute température, vous réduirez la formation de HCAs en retournant souvent les morceaux au cours de la cuisson, plutôt que de griller intensément une face, puis l’autre, comme nous le faisons habituellement en Europe aujourd’hui.
Traditionnellement, la viande se faisait rôtir sur une broche tournante. La cuisson au wok, également, se fait certes à haute température, mais les aliments sont agités et ne sont donc exposés directement à la chaleur que de courts instants.
Une chose extrêmement importante à savoir : faire mariner la viande avant la cuisson permet de réduire de 90 % la teneur en HCAs de la viande.
Les marinades sont des mélanges de vin, huile d’olive, yaourt ou jus de citron avec des aromates, des herbes, des épices, de l’ail. On met la viande à mariner en principe une nuit au frigo. Si on n’a pas pu s’y prendre à l’avance, on peut faire une “marinade express” de 40 minutes, mais le résultat ne sera bien sûr pas le même.
Cet effet protecteur des marinades explique que l’on retrouve le principe dans la plupart des cultures du monde (autour de la Méditerranée, en Inde, en Chine, au Japon, au Mexique).
Que penser de la viande rassie ?
La viande achetée à la boucherie ou en supermarché ne se garde que 3 à 4 jours au frigo dans son papier d’origine. La viande hachée doit être préparée dans les douze heures. Les steaks et rôtis ne se conservent que 2 jours.
Comment certains restaurants proposent-ils de la viande rassie sur l’os vieille de 3 semaines, 6 semaines ou même 12 semaines ?
C’est que, d’une part, il s’agit de viande spéciale, de très bonne qualité, très “persillée”, c’est-à-dire avec de la graisse dans le muscle.
D’autre part, la viande n’est pas découpée pendant le temps de maturation. On parle d’un quartier de bœuf entier ou en tout cas d’un morceau de viande de plusieurs kilos, avec les os. Cela limite la surface exposée à l’oxygène et permet la formation d’une croûte protectrice qu’on enlève avant de la cuisiner.
Enfin, cette viande est mise à maturer dans des frigos spéciaux très froid (2°C) et avec très peu d’humidité.
L’intérêt de la viande ainsi rassie est qu’elle perd de l’eau (environ 1 % de sa masse par jour). Vous n’avez pas l’effet de flaque dans la poêle. Les sucs sont plus concentrés, la graisse pénètre dans les fibres musculaires et la viande devient fondante avec un goût de noisette.
Vous pouvez faire de la viande rassie chez vous mais alors il vous faut un frigo à part (pour éviter que les odeurs de la viande s’installent dans votre beurre et vos fromages), ainsi qu’un sac spécial dans une membrane qui laisse sortir l’humidité, mais ne lui permet pas de rentrer (sur le principe du GoreTex). Il faut chercher sur Internet “sac de maturation dry age”.
Ainsi vous obtenez l’effet “asséchant” d’une chambre froide de boucher, sans quoi bien sûr la viande se mettrait à sentir mauvais et à pourrir.
Vous pouvez voir sur Youtube des vidéos montrant l’expérience avec un beau morceau de côtes de bœuf : https://www.youtube.com/watch?v=VpMDicHuXuY&feature=emb_logo
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
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