Chère lectrice, cher lecteur,
Un petit Espagnol qui n’était pas vacciné a attrapé fin mai la diphtérie.
Cette maladie est donc réapparue après 27 ans, car le dernier cas enregistré en Espagne date de 1983 !
L’affaire illustre l’importance de fournir aux populations le vaccin Diphtérie-Tétanos-Poliomyélite (DTP) qui est actuellement en rupture de stock en France, et remplacé par le super-vaccin Infanrix Hexa, très controversé [1].
Tout aussi dramatique, on s’est aperçu à cette occasion que les Autorités de santé espagnoles ne disposaient d’aucune dose du traitement contre la diphtérie.
Rappelons que la diphtérie est une terrible maladie infectieuse provoquée par une bactérie qui commence par un gonflement de la gorge et peut détruire tous les organes. Sans traitement, on en meurt dans 40 % des cas.
Toutefois, le traitement a été découvert par le célèbre Dr Emile Roux il y a plus de 120 ans, en 1894 !!
Il s’agit d’injecter au malade du sérum d’un patient ayant lui-même attrapé la maladie et y ayant survécu. Le sérum est le liquide principal composant le sang et il contient alors des « antitoxines » qui permettent de neutraliser les toxines mortelles produites par la bactérie de la diphtérie.
Ce traitement permet de soigner 98 % des cas de diphtérie. Car le taux de décès est de :
- 0 % si le sérum est injecté le1er jour
- 4 % si le sérum est injecté le 2e jour
- 11 % si le sérum est injecté le 3e jour
- 17 % si le sérum est injecté le 4e jour
- 20 % si le sérum est injecté le 5e jour ou au delà.
On comprend donc l’extrême urgence d’administrer le traitement quand on diagnostique une diphtérie.
Le pot-aux-roses est découvert !
Le problème, c’est que les Autorités de santé espagnoles ne disposaient pas en réserve de la moindre dose de sérum antidiphtérique quand le cas s’est déclaré.
Le petit Espagnol (dont on ignore le nom mais dont on sait qu’il a 6 ans) a montré des symptômes de diphtérie dès le 23 mai.
Ce n’est que le 28 mai, soit 5 jours plus tard, qu’il a été admis à l’hôpital.
Il a fallu encore attendre un jour pour analyser un échantillon de son sang au Centre national de microbiologie, et encore un jour pour confirmer le diagnostic de diphtérie.
Ce n’est que le 30 mai qu’il fut transféré en catastrophe à l’hôpital du Vall d’Hebron. Et c’est là que le pot-aux-roses fut découvert : nulle part en Espagne il n’y avait la moindre dose de sérum antidiphtérique [2] !!!
Autrement dit, l’Espagne se retrouvait, ni plus ni moins, dans la même situation que la France au début du XIXe siècle, quand le traitement n’existait pas encore.
Le ministère de la Santé espagnol, humilié, n’eut alors pas d’autre choix que de lancer un appel international à un pays capable de fournir le traitement.
La suite est digne d’un mauvais James Bond :
Après moult rebondissements, il fallut encore attendre 4 jours pour que, finalement, ce soit l’ambassadeur de Russie qui prenne spécialement l’avion de Moscou pour apporter, en Espagne, une dose de sérum [3] !!
Tout cela alors que, dans le traitement de la diphtérie, chaque jour compte !!
Cette histoire est tellement aberrante que vous avez sûrement du mal à y croire. Vous pouvez vérifier tout ce que j’ai écrit en consultant les références indiquées en bas de cet article. Il y a tous les liens vers les articles de la presse internationale.
Pas de lien fort entre vaccination et recul de la diphtérie
Certains pourraient penser qu’il est normal de ne pas avoir de traitements en Europe, puisque tout le monde est vacciné, ou devrait l’être.
En réalité, la vaccination ne protège jamais à 100 %. Il faut donc vacciner… et prévoir le traitement en cas de problème.
En effet, les épidémies de diphtérie, comme pour toutes les maladies infectieuses, peuvent toujours resurgir en cas de brusque dégradation des conditions de vie des populations, avec rupture des réseaux d’approvisionnement en eau potable et en nourriture et d’éventuels troubles civils (Fukushima par exemple).
La vaccination contre la diphtérie fut généralisée en France en 1938.
Pourtant, les cas de maladie furent multipliés par trois pendant la Seconde Guerre mondiale, passant de 15 000 à 45 000 par an.
En Allemagne, il y avait 100 000 cas de diphtérie en 1918, à la fin de la Première Guerre mondiale.
Dans les années 20, il n’y avait plus que 25 000 cas. Le régime nazi instaura la vaccination obligatoire dans les années 30. Mais en 1945, le nombre de cas de diphtérie était de 250 000, soit dix fois plus haut !
Cette flambée était évidemment due à la guerre qui avait ravagé le pays.
La paix revenue, le nombre de cas recula à nouveau de façon spectaculaire. Il n’y avait plus que 42 500 cas de diphtérie en Allemagne en 1950, 2500 en 1960, 800 en 1962, et 35 en 1972 !
Et c’est seulement alors, dans les années 70, que les grandes campagnes de vaccination contre la diphtérie recommencèrent en Allemagne [4].
En Espagne, on estime qu’il y avait au début du XXe siècle 60 000 cas de diphtérie chaque année et près de 5000 morts. Les données de l’année 1901 indiquent précisément 6299 morts.
En 1936 (début de la Guerre civile), il n’y avait plus que 1100 morts par an, mais en 1939, à la fin de la Guerre civile, le nombre était remonté à 4058.
En 1950, après la terrible Seconde Guerre mondiale, il n’y eut en Espagne que 297 morts de la diphtérie et, en 1964, 81 seulement. Sur la période de 1901 à 1964, le taux de décès a donc diminué de 98,7 % et celui de la maladie de 97,2 %.
La vaccination contre la diphtérie ne fut introduite à grande échelle en Espagne qu’à la fin des années 60, alors que la maladie ne faisait déjà pratiquement plus de morts.
La situation fut la même en Norvège, où la population n’était pas vaccinée contre la diphtérie. Elle eut 17 000 cas de diphtérie en 1919, contre seulement 54 en 1939, dont seulement 2 morts, quand la guerre éclata.
Mais la vaccination devint obligatoire en 1941 quand la Norvège fut occupée par les Allemands. En 1942, il y eut une très forte recrudescence, avec 22 787 cas et près de 700 morts.
Il est donc clair que la vaccination n’a joué qu’un rôle très mineur dans le recul de la maladie. L’hygiène et les traitements médicaux (antitoxine) ont, eux, joué un rôle majeur, incontournable [5].
Phénomène similaire pour d’autres maladies infectieuses
On observe d’ailleurs le même phénomène pour d’autres maladies infectieuses.
Ci-dessous, vous pouvez voir un graphique indiquant le recul des morts dûs à la rougeole (measles en anglais), à la scarlatine, au typhus, à la coqueluche (whooping cough) et à la diphtérie aux Etats-Unis.
Dans tous les cas, le nombre de morts a progressivement chuté avec le développement de l’hygiène, de l’eau potable, d’une meilleure nutrition entraînant une meilleure immunité, et bien sûr la découverte de nouveaux traitements médicaux, dont les antibiotiques.
Toutefois, à chaque grave crise entraînant une dégradation des conditions de vie, le nombre de décès dûs aux maladies infectieuses est remonté.
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si c’est la Russie qui a procuré la dose de sérum antidiphtérique à l’Espagne. Ce pays a en effet connu une grave recrudescence de diphtérie après l’effondrement du système soviétique, dans les années 90 [6], qui a abandonné à leur sort de larges pans de la population (personnes âgées, malades, isolées) qui dépendaient du système communiste pour leur survie et qui soudain n’ont plus eu aucune ressource.
L’extrême pauvreté, la misère noire, ont fait un retour en force et, avec elles, les maladies infectieuses d’autrefois.
Idem en Afrique du Sud, où le pays s’est fortement désorganisé depuis le début des années 2000 [7].
Les parents du petit Espagnol ont donc été imprudents. Mais les Autorités de santé n’ont pas été à la hauteur non plus, et à leur place j’éviterais de faire la morale à quiconque.
À noter que si l’on est allé chercher le sérum en Russie, c’est très probablement parce qu’il n’y en avait pas non plus en France, en Allemagne, en Angleterre, ni en Italie.
Puisque vous savez désormais que vous ne pouvez pas compter sur les autorités pour vous fournir un traitement en cas de retour en force des maladies infectieuses, c’est une raison de plus pour prendre vos précautions afin de vous immuniser.
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
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