Sommes-nous vraiment si “riches” ?
En principe, nous sommes de plus en plus riches. Mais beaucoup d’entre nous ont l’impression au contraire de s’appauvrir.
Pourquoi ?
Imaginez être propriétaire d’un appartement au centre-ville de Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille ou Paris.
Depuis 1970, vous voyez sa valeur monétaire s’envoler.
Il valait 100 000 francs à l’époque, il est passé à 300 000, puis 500 000 F. Aujourd’hui, il vaut 300 000 euros, soit 2 000 000 de francs !!
Apparemment, votre appartement vaut donc 20 fois plus cher. Vous avez l’impression d’être plus riche, même en tenant compte de la hausse du coût de la vie.
Vous avez l’impression d’être plus riche, même en tenant compte de la hausse du coût de la vie. Et pourtant…
Et pourtant.
A y regarder de plus près, c’est toujours le même appartement. Vous n’avez pas gagné un mètre carré à l’intérieur.
Par ailleurs, votre quartier autrefois calme est devenu bruyant. Vous connaissiez vos voisins, les enfants et les commerçants. Le facteur, votre banquier même, étaient presque des amis.
Vous pouviez échanger des nouvelles et de menus services. Aujourd’hui, la population a changé. Vous ne connaissez plus grand monde, voire personne. Les commerces sont devenus des magasins de chaîne de chaussures, de lingerie, téléphones portables, auto-écoles et assurances…
En 1975, vous pouviez garer votre voiture au pied de l’immeuble, la charger et la décharger tranquillement. En 40 minutes vous étiez déjà loin dans la campagne, au milieu des prés, des fermes et des forêts.
Aujourd’hui, il n’y a plus de place pour s’arrêter. Lorsque vous déchargez, vous devez surveiller de ne pas vous faire voler des affaires. Quant à sortir de la ville, c’est devenu une odyssée entre les feux rouges, les bouchons et les nœuds autoroutiers.
Votre cinéma de quartier a fermé. Récemment la façade de votre immeuble a été taguée. Vous avez une impression désagréable de saleté qui gagne. Le square où s’égaillaient autrefois des bandes de joyeux galopins héberge aujourd’hui des individus louches qui trainent sur les bancs en pleine journée.
Votre appartement vaut toujours, en argent, vingt fois plus cher qu’en 1975.
Mais vous, êtes-vous plus riche, ou… plus pauvre ?
L’illusion de la richesse façon 21e siècle
La définition classique de la richesse est exclusivement financière : le compte en banque, les placements, les biens matériels.
On part du principe que l’argent permet d’acquérir tout ce qu’on peut désirer : le pouvoir, le logement, les moyens de transport, les biens de toutes sortes, les services.
Le biais de ce raisonnement est évident : beaucoup de choses de grande valeur ne peuvent pas être achetées, quel que soit le prix que nous serions prêt à y mettre.
Par exemple, la santé : une fois perdue, vous ne pouvez pas la racheter pour un million, ni même pour cent millions. L’amitié : vous pouvez attirer à vous des profiteurs intéressés par votre argent, non “acheter” des amis. La définition même de l’amitié est qu’elle est gratuite.
Cela explique la multitude de personnes désespérées dans notre société alors qu’elles sont, selon tous les points de comparaison dans l’espace et dans le temps, riches ou très riches, n’ayant absolument aucun manque de nourriture, ni de vêtements, ni de sécurité physique, ni de logement.
Tout pour être heureux, et pourtant pauvre
Beaucoup de personnes ont “tout pour être heureuses” et pourtant elles n’ont rien.
Jamais il n’y a eu autant de dépressifs, d’angoissés, de suicidaires, de malheureux qu’à notre époque, que ce soit en proportion de la population ou en valeur absolue.
Contempler ce naufrage collectif ne peut que nous inciter à redéfinir la richesse, et je propose la définition suivante, qui est l’exact inverse de la définition classique : la richesse, c’est de posséder en abondance les biens qui ne peuvent être achetés. Posséder ce que l’argent ne peut pas vous apporter.
En effet, il suffit d’observer la société aujourd’hui pour s’apercevoir que notre monde produit en abondance les marchandises qui peuvent être achetées avec de l’argent. Il ne fait même pratiquement plus que ça. Si bien toute personne avec de l’argent, où qu’elle se trouve sur cette planète, peut s’acheter à tout moment les dernières baskets, le dernier iPhone, le dernier T-shirt, le nouveau menu de McDonald’s.
Mais est-ce ça, être riche ?
Je propose de considérer au contraire comme des richesses véritables uniquement les choses qui ne peuvent pas être produites à l’échelle industrielle, qui ne peuvent pas être achetées ni vendues dans les magasins ni sur Internet.
La richesse authentique, et comment l’acquérir pratiquement sans argent
Nous pouvons commencer notre enquête avec une série de questions :
1) Quelle serait la conséquence pour la santé d’une personne, si la médecine et les médicaments d’aujourd’hui ne lui étaient soudain plus accessibles ? Ou pour le dire d’une autre façon : dans quelle mesure sa “bonne santé” est-elle dépendante d’interventions marchandes, comme des médicaments ou des opérations ?
La définition même d’une bonne santé est qu’elle est assez solide pour se passer de médicaments ou d’interventions médicales coûteuses. C’est donc une forme authentique de richesse.
2) La forme physique et l’endurance : imaginez une personne qui fait naufrage en bateau. Trois kilomètres la séparent du rivage. Il n’y a pas de sauveteur pour l’aider. Son argent et sa carte de crédit ne lui sont d’aucune aide. Saura-t-elle nager et rejoindre la terre ferme ? Si oui, elle possède une vraie richesse.
3) Les connaissances et l’esprit. Cicéron disait : “Celui qui possède une bibliothèque et un jardin n’a besoin de rien d’autre.” A mon avis, il avait tort. La question n’est pas de savoir si quelqu’un possède une bibliothèque, mais combien de livres il a effectivement lu, compris, retenu.
Autrement dit, les connaissances et le plaisir qu’il sait retirer de la lecture sont sa vraie richesse, pas le nombre de livres achetés.
4) La même chose vaut pour le jardin. La question n’est pas de savoir combien la personne possède d’hectares ou d’arbres, ou de terre, mais ce qu’elle y fait : quel plaisir retire-t-elle à soigner ses fleurs, cultiver ses légumes, se promener ou se reposer (avec qui ?) dans son jardin.
Autant de choses que l’argent ne peut pas lui procurer.
Combien d’amitiés la personne a-t-elle su conserver, depuis la maternelle ? Sur combien de personne peut-elle compter vraiment en cas de crise extrême ? Combien de foyers lui sont ouverts, lui feront bon accueil, par beau comme par mauvais temps ?
Que se passerait-il si l’on considérait les personnes sans vrais amis comme des pauvres, qui méritent d’être plaints, et envers qui la société exigerait des efforts de solidarité, quel que soit le niveau de leur compte en banque et de leurs biens matériels ?
Beaucoup de personnes ont des relations professionnelles qu’elles considèrent comme des “amis”, pour masquer le puits sans fond de leur pauvreté en termes de vraies amitiés. Et beaucoup de personnes très entourées, dont tout le monde parle, n’ont pourtant, autour d’elles, aucun ami.
Qui sont les vrais amis d’Emmanuel Macron ? En a-t-il un, seulement ? Ou de notre milliardaire Bernard Arnault, actuellement l’homme le plus riche du monde ? Ou son gendre, Xavier Niel, qui lui aussi possède des milliards ?
Combien de vrais amis Emmanuel Macron possède-t-il ?
Et Bernard Arnault, l’homme le plus riche du monde ?
Ou encore Xavier Niel, un des hommes les plus riches de France ?
5) Les compétences et talents artistiques : personne ne peut payer un pianiste pour faire les gammes à sa place. Ni quelqu’un pour chanter, danser, peindre ou sculpter, à sa place.
Si vous voulez développer vos talents artistiques, vous n’avez pas le choix. Il faut du travail, de la discipline, du temps. Cela ne s’achète pas, et pourtant celui qui possède de tels talents peut être considérée comme vraiment riche.
“Elle a des doigts en or”, dit-on. Mais ne nous y trompons pas. Même les plus grands génies n’auraient rien produit s’ils n’avaient pas travaillé sur eux-mêmes pour perfectionner leur art.
“Le génie, c’est cinq pourcent d’inspiration, quatre-vingt quinze pourcent de transpiration”, disait Ludwig van Beethoven.
6) De même, il n’existera jamais un magasin où l’on pourra acheter de la méditation, du yoga, de la sagesse, sur étagère.
La difficulté n’est pas d’acheter le Tipitaka (livre saint du Bouddhisme), ni le Livre de la Sagesse (dans l’Ancien
C’est, encore une fois, de les comprendre, les mettre en pratique et, plus encore, de s’y tenir !
Changer notre définition de la richesse, une urgence
Que se passerait-il donc si la richesse était mesurée en termes de santé, d’amitié, de talent, de courage, de sens de la justice, de modération, d’empathie, d’honnêteté, de sens du service et du sacrifice, y compris quand tout semble s’écrouler autour de nous ?
Ce ne serait, bien sûr, que le début du changement.
Il faudrait être capable de bâtir un monde fondé sur la vraie richesse durable, ce qui suppose tout un travail. Il faudrait commencer par identifier les plus grandes urgences de notre temps, y trouver des remèdes, motiver nos concitoyens pour élire les bonnes personnes au pouvoir pour redresser la situation, éviter les catastrophes, les souffrances inutiles.
Et lorsque nous réfléchissons à notre façon actuelle de considérer la richesse, cela pose la question : et si notre époque était en train d’atteindre un creux historique en termes de pauvreté de culture, d’esprit, de sagesse, d’intégrité, de chaleur humaine, de bonté, d’amitié, de sens pratique et de bon sens ?
A votre santé !
Jean-Marc Dupuis
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