La mammographie sauve des vies, oui mais.
« La mammographie sauve des vies » affirment les publicités pour le dépistage du cancer du sein. Elles s’étalent dans les magazines, les abribus et les gares, et sont destinées aux femmes de toutes origines.
Cependant, les grandes revues scientifiques, celles qui sont lues par l’élite sociale et médicale, expliquent le contraire.
C’est encore le cas d’un tout récent numéro d’une des plus prestigieuses revues scientifiques du monde, Nature, qui consacre un dossier au sujet :
« Les campagnes de santé publique donnent souvent aux femmes un message simple : la mammographie sauve des vies. Mais les données scientifiques derrière sont si floues que les experts ne parviennent pas à se mettre d’accord sur qui a vraiment besoin d’être dépisté. (…) Le Swiss Medical Board soutient la suppression pure et simple des campagnes de dépistage. »
Le Swiss Medical Board est l’autorité de Suisse qui évalue l’efficacité des procédures médicales [1]. La Suisse est considérée comme ayant le meilleur système de soin en Europe après les Pays-Bas [2].
Ce n’est pas nouveau
Les personnes qui exercent leur esprit critique sur les consignes de santé savent depuis longtemps qu’il faut se méfier des mammographies.
Ainsi, il y a trente-deux ans, le Dr Henri Pradal, pharmaco-toxicologue, alertait :
« Il est facile de démontrer que la radiographie des seins de toute une population féminine particulièrement exposée au cancer provoque davantage de processus cancéreux qu’elle n’en dépiste [3]. »
Une étude, publiée le 20 octobre 1993 dans le Journal of National Cancer Institute, montrait une augmentation très nette du cancer du sein après les traitements par rayons de certaines maladies bénignes du sein chez les femmes âgées de plus de 40 ans au moment des premiers traitements.
La plus grande étude jamais réalisée pour évaluer l’impact du dépistage par mammographie, réalisée au Canada sur 90 000 femmes et publiée en 2014 dans le British Medical Journal, a conclu que les femmes ayant réalisé des mammographies ne vivaient pas plus longtemps que les autres [4].
L’équipe responsable de l’étude était si perplexe devant ces résultats qu’elle décida d’en différer la publication.
Cornelia Baines, médecin épidémiologiste à l’université de Toronto qui a participé à l’étude, explique :
« Nous avons décidé d’attendre car nous pensions qu’il fallait peut-être encore deux ans pour voir apparaître les bienfaits du dépistage. Mais vingt-cinq ans plus tard, ils n’ont toujours pas apparu [5]. »
La réponse des médecins majoritaires
Cette étude a évidemment déclenché un coup de tonnerre dans les milieux médicaux, et en particulier chez les radiologues et cancérologues qui vivent littéralement de la mammographie.
Des dizaines millions de mammographies sont réalisées chaque année dans le monde. C’est une industrie qui pèse lourd en équipements comme en emplois et en budgets de communication. Si les mammographies sont « gratuites » en France pour les patientes, elles ne le sont pas pour la collectivité qui paye le matériel, les émoluments des médecins, du personnel médical et des agences qui organisent les campagnes de publicité.
C’est donc une levée de boucliers qui a eu lieu à l’annonce des résultats de l’étude canadienne.
L’American Cancer Society s’est hâtée de publier un communiqué expliquant que la mammographie reste recommandée :
« L’étude canadienne montre que le dépistage ne réduit pas le nombre de décès par cancers du sein, mais provoque des surdiagnostics, autrement dit des cancers qui ont été trouvés et traités, alors qu’ils n’auraient jamais évolué ni posé de problèmes. »
« Mais ces conclusions sont contradictoires avec une douzaine d’études cliniques utilisées par les experts en cancer du sein. Elles contredisent aussi le consensus de la plupart des experts, qui estiment que le dépistage réduit le risque relatif de décès de 15 % chez les femmes âgées de 40 à 59 ans [6]. »
Réduire le risque relatif de 15 %, cela semble formidable effectivement.
Mais cette présentation est trompeuse. Lorsque vous regardez les chiffres, la réalité est la suivante : sur 1000 femmes qui se font dépister sur une période de 20 ans, il y a parmi elles 5 décès par cancer du sein au lieu de 6 si elles ne s’étaient pas fait dépister.
« Cela fait une vie sauvée en vingt ans, c’est déjà ça », pourrait-on se dire.
Certes. Mais c’est oublier que, sur cette période, 40 % des femmes qui se seront fait régulièrement dépister auront eu une fausse alerte, avec des dégâts considérables [7].
Les dégâts des fausses alertes
Les fausses alertes ne sont pas innocentes.
D’abord, bien sûr, elles provoquent toujours une angoisse horrible chez les victimes.
Certaines sombrent dans la panique. D’autres dans la dépression.
Pour confirmer le diagnostic, il faut une autre séance de rayons X, et cela à dose supérieure, augmentant l’irradiation du sein.
Ensuite, il faut souvent faire une biopsie (piquer dans le sein pour prélever des cellules). Cette opération risque de provoquer une diffusion des cellules cancéreuses s’il y en a.
Si l’on constate que les cellules sont cancéreuses, cela ne veut pas forcément dire que la tumeur est dangereuse. Pourtant, il est impossible pour la femme de ne pas être extrêmement inquiète. Elle recherchera un traitement. C’est normal.
La femme doit subir une opération pour se faire enlever la tumeur et plus souvent un lobe du sein voire le sein entier. En général, ces traitements sont suivis de séances de radiothérapie, ainsi qu’une thérapie hormonale pendant 5 ans.
Les conséquences sont graves :
- La radiothérapie augmente le risque de décès cardiaque de 25 %. Elle est particulièrement dangereuse quand elle touche le sein gauche, du même côté que le cœur.
- Elle augmente le risque de cancer du poumon de 80 % [8].
- La thérapie hormonale, en général le tamoxifène, bloque les effets des œstrogènes dans l’organisme, ce qui provoque des baisses de moral, diminue la libido, entraîne une sécheresse vaginale et augmente le risque de caillot sanguin et d’attaque cérébrale.
Le dépistage par mammographie détecte beaucoup de cancers bénins mais ne réduit pas le nombre de tumeurs mortelles
Une étude menée par Peter Gotzsche, directeur du Nordic Cochrane Center de Copenhague, a montré qu’un tiers des femmes au Danemark sont victimes de « surdiagnostic », c’est-à-dire d’un cancer détecté alors qu’il n’aurait jamais posé problème. Dans d’autres pays comme l’Angleterre, l’Australie et la Suède, ce taux dépasserait les 50 %.
La mammographie détecte en effet 30 % de carcinomes canalaires in situ, un type de cancer du sein peu dangereux, et dont la médecine est incapable de prédire l’évolution.
Seuls 20 à 30 % d’entre eux deviennent agressifs, et au bout de vingt ans seulement [9].
Mais dans le doute, de nombreuses femmes préfèrent se faire opérer pour chasser l’angoisse du cancer.
Elles subissent toutes les angoisses et les souffrances d’une personne victime d’un véritable cancer, alors que si elles ne s’étaient pas fait dépister, leur cancer aurait pu :
- Ne jamais se révéler : beaucoup de cancers repérés par mammographie sont à évolution si lente que la personne serait morte d’une autre cause avant que le cancer ne se révèle ; elle n’en aurait jamais souffert et, plus important encore, elle ne s’en serait jamais inquiétée.
- Régresser naturellement : on l’oublie souvent, mais les cellules cancéreuses sont naturellement la cible de notre système immunitaire. Il n’est pas rare que de petites tumeurs disparaissent d’elles-mêmes (pour améliorer le fonctionnement de l’immunité contre les cellules cancéreuses on peut notamment prendre de la vitamine D).
- Le cancer aurait aussi pu se révéler bien plus tard : lorsque le cancer est décelé de façon précoce, les traitements provoquent souffrance et angoisse immédiatement. Ce n’est pas neutre. Ce sont souvent les « belles années » qui sont ainsi compromises. Tout cela pour éviter le risque d’un cancer qui se serait révélé peut-être bien plus tard, à une période de la vieillesse où la bonne santé n’est plus aussi cruciale.
- En outre, plus le temps passe, plus efficaces sont les traitements du cancer du sein. C’est une raison de plus de ne pas chercher à se faire dépister trop vite. La mammographie permet surtout de détecter les cancers à évolution lente, qui sont les moins dangereux. Selon une étude de H. Gilbert Welch, spécialiste du cancer à la Geisel School of Medicine (USA), le dépistage généralisé du cancer n’a pas réduit le nombre de tumeurs agressives de stade avancé, les plus dangereuses [10].
- Actuellement, le cancer du sein est une maladie si redoutée que la plupart des femmes s’aperçoivent qu’elles ont une boule dans le sein à temps pour recevoir les meilleurs traitements.
Des cancers du sein qui disparaissent d’eux-mêmes
Une nouvelle étude publiée dans Archives of Internal Medicine a confirmé ce que nous étions très nombreux à soupçonner : de nombreuses tumeurs mammaires se résorbent spontanément. Elles disparaissent d’elles-mêmes, totalement.
Les femmes qui se font dépister se croient touchées par le cancer. On les opère, elles subissent des rayons et des chimiothérapies. Mais cette étude, menée par des chercheurs américains et norvégiens, révèle que 22 % des cancers détectés par mammographie régressent au point de ne plus être détectables au bout de six ans.
Le paradoxe du dépistage
Et pourtant, le dépistage du cancer du sein n’a jamais été aussi populaire qu’actuellement.
Les foules le réclament, les politiciens en promettent plus, les stars de la télé en rajoutent.
Le spécialiste du dépistage Peter Gotzsche propose une explication intéressante à ce phénomène.
Selon lui, « plus les femmes en bonne santé sont victimes de surdiagnostic lors du dépistage, plus elles sont satisfaites parce qu’elles pensent “le dépistage m’a sauvé la vie” ».
Traitées inutilement d’un cancer qui, de toutes façons, ne leur aurait jamais causé aucun tort, elles croient devoir leur survie au dépistage et au progrès médical.
Alors qu’elles sont souvent les victimes mutilées du système, elles en deviennent les avocates les plus enthousiastes, incitant d’autres femmes autour d’elles à se faire dépister à leur tour.
Cette approche n’est pourtant pas raisonnable. Les données scientifiques actuelles ne la justifient pas. Il est par contre très important d’informer les femmes des moyens naturels de réduire le risque de cancer du sein.
Comment réduire le risque de cancer du sein naturellement
Pour réduire efficacement le risque de cancer du sein, il faut limiter son exposition aux hormones féminines de synthèse (du type pilule contraceptive), surtout avant 20 ans.
L’usage de la pilule avant 20 ans augmente de 45 % le risque de cancer du sein à l’âge de 40 ans chez les femmes porteuses du gène BRCA1 [11], mais très probablement aussi chez les autres.
Tomber enceinte avant 30 ans réduit le risque de cancer du sein. Plus une femme porte d’enfants, plus elle est protégée contre le cancer du sein. Réciproquement, ne pas du tout porter d’enfants (nulliparité) accroît le risque de cancer du sein.
Une célèbre étude publiée dans Science en 2003 a montré l’effet protecteur de l’exercice physique contre le cancer du sein, surtout pratiqué à l’adolescence. Chez les adultes, le sport pourrait diminuer le risque de cancer du sein en abaissant le niveau d’hormones et de facteurs de croissance. L’activité sportive régulière dans l’enfance peut aussi retarder l’apparition des règles, ce qui diminue la période d’exposition aux œstrogènes et réduit le risque de cancer du sein [12].
Perdre du poids est particulièrement efficace. Une femme qui perd 4,5 kg entre l’âge de 18 et 30 ans diminue de moitié son risque de cancer du sein [13].
L’étude française E3N a démontré que les femmes qui ont le taux de vitamine D le plus élevé ont 25 % de risque de cancer du sein en moins. Nous sommes en plein mois de décembre, il n’y a plus assez de soleil, n’oubliez pas de prendre tous les jours un peu de vitamine D !
De bonnes bactéries intestinales protègeraient contre le cancer du sein
Enfin, les chercheurs s’intéressent de plus en plus au microbiome (les bactéries vivant dans l’intestin) comme facteur de protection contre le cancer du sein.
Des expériences menées par Susan Erdman, microbiologiste au MIT (Cambridge, USA) ont montré que les antibiotiques et la « malbouffe » modifient la flore intestinale, nous rendant plus vulnérables aux infections, à l’inflammation, ce qui augmente notre risque de cancer du sein, des ovaires et de la prostate.
Selon elle, « dans le futur, les thérapies qui ciblent le microbiote (flore intestinale) pourraient diminuer le risque de cancer », explique-t-elle dans le dossier sur le cancer du sein publié dans Nature le 19 novembre 2015.
À ma connaissance, la meilleure façon de le faire est de manger beaucoup de légumes frais et bios contenant des prébiotiques (nourriture pour les bactéries des intestins), et de prendre de bons probiotiques (bactéries capables de s’implanter dans l’intestin et d’y exercer une action favorable : Lactobacillus gasseri, Lactobacillus acidophilus, Lactobacillus Casei, Streptococcus thermophilus en particulier, à au moins 10 milliards d’unités par prise (et plus de 20 milliards si possible).
À noter qu’une bonne flore intestinale et une alimentation saine provoqueront aussi un retour spontané vers votre poids optimal : des études ont démontré que les femmes dont l’indice de masse corporelle (IMC) est de 31,1 ou plus risquent 2,5 fois plus de développer un cancer du sein que celles dont l’IMC est de 22,6 ou moins [14].
Et pour plus de conseils pour vivre et manger sainement, continuez à lire Santé Nature Innovation.
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
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