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Malgré l’avalanche de mauvaises nouvelles

La semaine dernière, j’étais assis à ma table de travail et j’ai cliqué (par accident) sur « Google Actualités » :

  • « Pyrénées-Orientales : en pleine baignade, un enfant myopathe se fait voler son fauteuil roulant » (Dépêche du Midi)
  • « Nantes : un corps retrouvé dans la Loire, son identification en cours » (Ouest-France)
  • « Brésil : une sanglante mutinerie fait au moins 52 morts, 16 détenus décapités » (Le Monde)
  • « Paris, un échafaudage s’effondre, un mort et trois ouvriers gravement blessés » (Le Parisien)
  • « Allemagne : un enfant de huit ans poussé sous un train meurt » (France-Info)
  • « Effondrement : l’humanité rongée par la fin » (Libération)
  • « Aube : les animaux d’une ferme pédagogique massacrés au cours de la nuit » (LCI)
  • « Le modèle nucléaire français s’effondre et nous mène à la catastrophe » (HuffPost)
  • Etc.

Et je ne parle pas des annonces cauchemardesques sur le réchauffement ni la disparition des espèces, par dizaines de milliers.

Garder la tête froide quand le monde semble s’écrouler

Cliquez sur n’importe laquelle de ces nouvelles, d’autres titres tout aussi effrayants surgissent à droite, à gauche, en haut, en bas, au milieu du texte, avec des nouvelles toujours plus terribles.

Faut-il déprimer ? S’affoler ? Écrire au Président de la République ? Quitter la France ?? Prendre une navette pour Mars ?

Peut-être.

Mais avant d’agir, prenons deux minutes pour réfléchir. Voyons ce qui se passe, pour voir si on ne peut pas garder la tête froide.

Tout a changé avec Internet

Il faut d’abord comprendre le mécanisme qui se cache derrière ces « pages d’information » sur Internet.

Autrefois, à l’époque des journaux en papier, vous aviez des êtres humains (journalistes, rédacteurs en chef…) qui s’efforçaient de réfléchir et d’éditer des journaux avec sérieux, professionnalisme.

Chaque journal se devait d’être équilibré, en présentant un ensemble d’articles reflétant en gros la complexité et la diversité du monde.

Les journaux avaient beaucoup de moyens car ils se partageaient d’importants revenus publicitaires. Ils pouvaient donc employer des personnes de haut niveau pour faire des enquêtes approfondies, des reportages fouillés, sur des sujets intéressants, vérifier les informations. Les journaux étaient en outre jugés par les lecteurs, sur la qualité et le sérieux des articles. Si un journal se mettait à raconter n’importe quoi, ou à sélectionner des articles aberrants allant toujours dans le même sens, les gens se rendaient compte qu’il y avait un problème d’objectivité, ils achetaient un autre journal, les recettes financières du journal fantaisiste diminuaient, et il disparaissait car entretenir un journal coûtait très cher.

Aujourd’hui, la situation est chamboulée.

Avec Internet, les journaux n’ont plus de quoi payer de bons journalistes. Ils sont remplacés par des stagiaires, des pigistes, des jeunes sans expérience, mal payés, avec très peu de temps pour faire leur travail.

Résultat, ils publient des articles encore plus faibles, éloignant encore plus les lecteurs et diminuant encore les maigres revenus publicitaires qui restaient.

Tout ce qui leur reste et qui fonctionne encore un peu est leur site Internet.

Le but des articles n’est pas de vous informer, mais de vous énerver pour vous faire cliquer

Or, sur un site Internet, la façon la plus simple de récolter de l’argent est de faire cliquer les gens sur des liens vers des publicités.

Chaque clic rapporte une commission, et c’est en fait pratiquement le seul revenu de tous ces sites.

Des « robots » sont donc programmés pour sélectionner les publicités et articles qui génèrent le plus de clics, et les afficher sur les pages.

Des sociétés spécialisées mettent en avant ces publicités et articles : Outbrain, Taboola, Ligatus, etc. Vous voyez souvent ces noms en petit à côté des vignettes qui affichent des titres et des images racoleuses.

Internet est donc devenu une machine gigantesque à collecter, aux quatre coins du monde, non les faits objectivement les plus inquiétants, mais ceux qui provoquent le plus de panique dans notre cerveau.

Ce sont ces articles-là qui récoltent le plus de clics. Ils sont donc sélectionnés par les programmes informatiques (robots) pour apparaître sur tous les écrans du monde, ce qui explique ces annonces sur la chute d’une météorite, la découverte d’une sauterelle monstrueuse, ou la mort d’une jeune fille dévorée par un requin au moment où elle faisait un selfie, etc., etc.

Une prime pour les articles qui annoncent la fin de l’humanité

Dans la bagarre, les articles qui nous annoncent la fin de l’humanité, bénéficient d’une prime énorme à la visibilité.

C’est à qui annoncera la catastrophe la plus folle, le fait divers le plus abominable, le désastre nucléaire, mondial, intersidéral, le plus définitif.

Nous ne pouvons tout simplement pas résister à cliquer.

Nous avons besoin de savoir.

Même si nous n’y croyons pas, il faut tout de même jeter un œil, ne serait-ce que pour nous assurer que le désastre ne va pas se produire dans la journée.

C’est ainsi que… « clic ».

Et une commission de quelques centimes tombe dans la poche du journal qui est parvenu à nous donner ainsi la frousse.

Ce n’est absolument pas un hasard si le développement d’Internet, et plus précisément des smartphones, a coïncidé avec la généralisation des théories apocalyptiques sur l’avenir, et une énorme augmentation du nombre de dépressions.

Tous les citoyens sont reporters, et donc les images de catastrophe se multiplient de façon exponentielle

Autrefois, seule une infime minorité des accidents qui se produisaient sur Terre étaient fixés sur pellicule photo puis publiés dans les journaux.

En outre, les journaux étaient publiés sur papier. On les lisait, puis on s’en servait pour faire du feu dans la cheminée, des boules pour mettre au fond des chaussures, ou éviter les tâches de peinture… Et tout le monde oubliait ce qu’il y avait dedans.

Aujourd’hui, chaque citoyen du monde est devenu reporter grâce à son smartphone. Il peut « partager », instantanément, tout ce qu’il voit autour de lui.

Chaque information mise sur Internet est inscrite pour l’éternité. Des milliards d’images sont partagées sur la toile à chaque instant.

Plus aucun crime, plus aucune catastrophe ne peut avoir lieu sans être abondamment filmée, et transmise, et ainsi s’ajouter au catalogue déjà interminable des horreurs que l’on trouve sur la Toile.

Le Monde est-il vraiment pire qu’avant ?

L’Homme – et le Monde – sont-ils en train d’empirer pour autant ?

Méritent-ils de tous mourir dans un grand « Déluge » tant ils sont devenus mauvais, comme dans l’histoire de Noé ?

Certains le pensent, tels ces jeunes terroristes qui se mettent à tirer dans la foule tellement on les a convaincus que l’être humain était un « nuisible », une espèce épouvantable qui détruit le monde comme un virus.

Mais si on observe les faits, il n’est pas si sûr que les choses soient pires qu’avant.

Elles ne sont sans doute pas meilleures (pourquoi le seraient-elles ?), mais elles ne sont pas pires non plus, ou du moins pas pires sur tous les fronts.

  • Savez-vous par exemple qu’il y a de moins en moins d’homicides, malgré les attentats ?
  • En nombre absolu, malgré la hausse de la population, la chute est continue depuis 2002, et ce sans que personne ne puisse expliquer pourquoi :
  • Savez-vous que, dans le monde, il n’y a jamais eu aussi peu de morts à cause des guerres ? [1]
  • Savez-vous que le nombre de personnes vivant dans la pauvreté extrême a chuté de façon très rapide depuis l’an 2000, passant de 36 % de la population mondiale en 1990 à moins de 10 % en 2015 ? Plus d’un milliard de personnes sont sorties de la pauvreté extrême ces 25 dernières années, selon la Banque Mondiale. [2]

Jamais il n’y a eu aussi peu de personnes pauvres et malades, en proportion de la population mondiale.

Ce qui n’empêche pas les journaux de nous donner l’impression que nous vivons dans une pauvreté galopante.

Pas de boule de cristal

Maintenant, il est évident qu’il est difficile de savoir à quelle sauce nous allons être mangés.

Pas plus que nos ancêtres, nous ne pouvons savoir ce qu’il adviendra vraiment de nos descendants dans 50, 100 ou 200 ans.

Il se pourrait que ce soit la catastrophe généralisée… ou peut-être pas.

En ce qui me concerne, quand on m’annonce toutes les grandes catastrophes prochaines… j’attends de voir.

Je n’aurais pas dit la même chose il y a 20 ans, où j’étais souvent affolé de ce que je lisais, et voyais. Je m’inquiétais énormément de l’avenir du monde. Mais je dois reconnaître humblement que les prédictions apocalyptiques que je faisais alors, sur la base soi-disant de faits bien établis, ne se sont pas réalisées.

Autrement dit, je me suis fait du mouron pour rien.

Pourquoi il est absolument vital de reconnaître que, si le Monde va mal, il y a aussi des choses qui vont bien, et qui méritent d’être remarquées

Aujourd’hui, beaucoup de choses vont mal (je ne vais pas en faire la liste, Google Actualités fait mieux que moi). Mais nous avons aussi, comme à toutes les époques, également des raisons d’éprouver de la gratitude.

C’est extrêmement important, vital même pour l’avenir, de le rappeler, et de se le répéter constamment.

En effet, quelle que soit la dureté de la vie et l’ampleur des défis qui nous attendent, il n’y a aucun doute que nous pouvons rendre la situation encore pire en cédant au désespoir, au catastrophisme, aux sentiments négatifs qui font sombrer dans le « nihilisme » (ne plus croire en rien).

Oui, la vie est dure, et les raisons de désespérer ne manquent pas.

Mais le défi des Hommes, à travers tous les siècles, a toujours été de trouver des raisons d’espérer ou du moins d’éprouver quelque sentiment positif, malgré un monde en perpétuel mouvement vers l’effondrement.

A chaque mauvaise nouvelle, il faut se souvenir que : « Un arbre qui tombe fait plus de bruit que toute une forêt qui pousse »,

En effet, sans cela, les Hommes baissent les bras, abandonnent le combat, délaissent leurs responsabilités, cessent d’essayer de construire, de préparer l’avenir, de réparer ce qui est cassé… et c’est alors que les vrais problèmes commencent.

On l’a vu, si souvent, dans l’Histoire.

Aujourd’hui, de nombreux prophètes de malheur dans les journaux annoncent qu’il est « trop tard », qu’il n’y a plus qu’à tout abandonner pour se préparer à « l’après ».

Le problème, c’est que cet après, si nous abandonnons tous nos responsabilités, ne sera pas un retour au « paradis perdu ».

Ce ne sera pas une société où nous pourrons tous circuler à vélo, sans voiture, dans la joie, la bonne humeur et la solidarité, avec des fruits et légumes bio pour tous, de l’énergie renouvelable gratuite, des maisons à consommation énergétique neutre, des métiers écologiques sans émission de CO2.

Cela, nous ne l’obtiendrons au contraire qu’en donnant le meilleur de nous-mêmes, en travaillant dur, en étant inventifs, organisés, honnêtes, sans casser le travail d’autrui, sans voler ce qui appartient à notre voisin, sans trahir nos compagnons, sans désespérer et faire désespérer tout le monde autour de nous, en particulier nos jeunes.

La bonne nouvelle, c’est que travailler dur à un avenir meilleur, en mobilisant tous nos talents, n’est pas désagréable, ni frustrant. Au contraire, c’est le plus sûr moyen d’être heureux.

C’est pour cela que je suis convaincu que nous pouvons tous, malgré tout, passer ce bel été avec un moral… au beau fixe ! C’est une décision à prendre, et chacun a la liberté de le faire, tous les matins, et à chaque instant. Heureusement !

À votre santé !

Jean-Marc Dupuis

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