1 sur 5 ignore qu’il y a du bœuf dans le hamburger
Chère lectrice, cher lecteur,
Une étude du Centre de l’innovation de l’industrie laitière, aux États-Unis, a établi que 48 % des Américains (adultes, plus de 18 ans) ne savent pas d’où provient le lait chocolaté vendu en bouteille dans les magasins [1].
Ils voient que c’est un liquide de couleur brune, sucré, mais ils n’ont pas la moindre idée de la façon dont on le fabrique.
Pire, 7 % pensent que c’est un liquide qui sort directement du pis des vaches brunes.
Cela représente environ 16,4 millions de personnes à l’échelle du pays.
Une autre étude avait montré qu’un Américain sur cinq ignorait que le hamburger était préparé avec de la viande bovine, et que beaucoup s’étonnaient que les frites soient de la pomme de terre [2].
Une autre avait montré qu’un étudiant anglais sur trois ignorerait comment cuire un œuf dur, et que la moitié serait incapable de préparer des spaghettis bolognaise [3].
Ne pas rire
Évitons de rire trop vite.
Quand je fais visiter mon potager, beaucoup de personnes instruites, voire très instruites, ne reconnaissent pas les pommes de terre, les courgettes, les tomates…
Nous sommes nés à une époque où la France était essentiellement rurale. Rares étaient les petits citadins qui n’avaient pas de grands-parents à la campagne. Il y avait encore dans les villes des cultures maraîchères, qui permettaient à chacun de voir comment poussent une salade, un radis, des épinards.
La plupart des enfants avaient un jour essayé de tirer sur des pis, ou marché dans une bouse de vache. Ils s’étaient introduits dans un poulailler pour ramasser des œufs. Ils avaient pris un agnelet dans les bras. Ils avaient vu tuer, ou avaient tué eux-mêmes, un poulet, un lapin, voire un porc.
Avec le passage à l’agriculture moderne, la disparition des fermes, transformées en unités de production industrielles et mécanisées, nous avons entrevu la possibilité qu’un jour ce monde disparaisse complètement.
Que les enfants imagineraient que le poisson pané était une espèce vivant telle quelle dans la mer ; qu’ils ne supporteraient plus l’idée que le steak provienne d’un animal ; qu’ils imagineraient que les frites poussent sur des arbres.
Cette perte de contact avec la réalité nous paraissait néanmoins impossible.
Et puis non, c’est arrivé.
Aujourd’hui, dans la ville de Boulogne-sur-Mer, historiquement le premier port de pêche français, les enfants des écoles dessinent un rectangle quand on leur demande de dessiner un poisson. Un rectangle de poisson pané. C’est une psychomotricienne qui travaille là-bas qui m’a raconté cela.
Le difficile retour à la vie sauvage
Dans le film Into the Wild sorti en 2007, un étudiant américain, écœuré par la société de consommation, veut revenir à la nature. Il part tout seul dans les montagnes sauvages d’Alaska.
Dans une scène devenue mythique, le héros triomphe d’avoir abattu un élan. Il se prend en photo sur la carcasse.
Mais lorsqu’il essaie de le manger, il s’aperçoit que ses dents et ses ongles ne sont pas assez acérés pour déchirer la peau d’un élan, dure comme du cuir. Ce garçon l’avait « oublié ».
Il faut des outils et des techniques particulières pour débiter l’animal. Il se met au travail mais cela lui prend des jours ! Si bien que, au moment de commencer à manger, le pauvre héros s’aperçoit que la viande a pourri. Elle est infestée de vermine, immangeable.
Cherchant à se nourrir de plantes sauvages grâce à un guide de botanique récupéré dans une bibliothèque municipale, il confond l’Hedysarum mackenzii, toxique, avec l’Hedysarum alpinu, une légumineuse dont la racine renflée est consommée sous certaines conditions par les populations autochtones. Les deux plantes sont en effet difficiles à distinguer. Il meurt empoisonné.
C’est une terrible image du retour à la nature : la nature est dure, hostile, et l’homme n’y survit que grâce à une connaissance précise de son environnement : comment fabriquer et utiliser une lance, un arc, un piège, quelles racines, graines, plantes, écorces, manger…
L’homme primitif beaucoup plus savant qu’un polytechnicien
On imagine souvent que l’homme a commencé dans l’ignorance, et qu’il est peu à peu devenu plus savant, jusqu’à nos jours où nous avons des smartphones et envoyons des robots sur Mars.
En réalité, c’est le contraire.
Nos prouesses technologiques ne sont pas le signe que chacun de nous sait plus de choses que nos ancêtres chasseurs-cueilleurs.
C’est la division du travail et de la connaissance entre les hommes modernes, à l’échelle du monde entier, qui permet le progrès technique.
Un smartphone est le fruit de la coopération de dizaines de milliers d’ingénieurs spécialisés qui, chacun, en maîtrisent un minuscule composant. Ils ne se connaissent pas, les uns sont suédois, américains, les autres indiens ou japonais. Mais au bout du compte, vous avez un smartphone qui marche.
Cette spécialisation nous permet de contribuer à des projets complexes impossibles à nos ancêtres. Mais il faut aussi se rendre compte qu’elle nous permet de vivre en nous contentant d’une connaissance hyperpointue, et donc de traverser la vie sans connaître notre environnement. Nous pouvons nous déplacer toute notre vie en voiture sans savoir comment marche le moteur, manger des tomates sans savoir comment elles poussent.
Ce n’était pas le cas autrefois où les hommes étaient impliqués dans toutes les tâches qui permettaient leur survie.
Le chasseur dans la jungle ne peut compter que sur lui-même et les quelques membres de sa tribu. Il doit savoir tout faire, de la construction de sa pirogue à sa hutte, en passant par ses vêtements, sa maison, ses remèdes, sa nourriture, la guerre…
C’est pourquoi, pris individuellement, il sait infiniment plus de choses que chacun de nos modernes ingénieurs. D’où le succès des films comme Crocodile Dundee ou Un Indien dans la ville, qui nous rappellent avec émotion à quel point les hommes qui vivent dans la nature sont capables de prouesses étonnantes pour les citadins.
Ce qui nous attend
Plus le temps va passer, plus la perte du contact avec la nature va progresser.
De là toutes les maladies de civilisation (obésité, syndrome métabolique, dépression, maladies cardiovasculaires, arthrose, allergies, cancers, maladies psychiques en tout genre…) qui sont la conséquence ultime de vies déconnectées de notre réalité physique, des besoins profonds de notre corps et de notre esprit.
Il n’est pas étonnant que les États-Unis soient déjà loin devant nous dans toutes ces maladies. On parle de 74 % de la population en surpoids [4]. Sur 10 ans (de 1993 à 2003), le nombre d’enfants autistes a progressé de 657 % [5].
Collectivement, nous sommes au bord du précipice puisque les dépenses de santé sont réparties entre tout le monde. Aux États-Unis, le système médical consomme désormais 17,5 % de la richesse produite, contre 13 % en 2000.
Cela veut dire que chaque Américain passe 2 mois par an à travailler uniquement pour financer les dépenses de santé.
Bientôt, ce sera 3 mois, puis sans doute 4, 5, 6…
Mais ce que nous pouvons faire à l’échelle personnelle, c’est de ne pas tomber nous-même dans le piège des maladies de civilisation. S’efforcer, tant qu’il est encore temps, de manger sainement, de vivre sainement et, si possible, de penser sainement !
Redécouvrir l’art et le plaisir de transmettre les traditions culinaires
Car il faut bien réaliser que, si tous ces Américains ignorent comment on fait du lait chocolaté, c’est parce que personne ne leur a jamais montré comment faire leur propre mélange avec du cacao Van Houten, planter une salade, traire une vache !
On leur a toujours acheté du lait chocolaté en brique UHT !
Imaginez ce que cela indique sur leur enfance, sur leur vie ?
Alors veillons, nous aussi, à ne pas faire des petits « orphelins » de l’art de vivre et de l’art culinaire qui nous ont été transmis.
Même pour un aliment aussi malsain que les frites, que je ne conseille pas, essayons au moins une fois de les faire nous-mêmes, avec nos enfants, plutôt que d’ouvrir un sac plastique de frites surgelées.
Pour le cacao, prenons une bonne cuillère à café de Van Houten, de la cannelle, un peu de lait frais et faisons une bonne pâte qui servira de base à un vrai chocolat chaud traditionnel.
Plantons, sur notre balcon ou près d’une fenêtre, un plant de tomates cerises dans un pot. Rien de plus facile, à partir du moment où l’on met un tuteur et où l’on prend soin d’arroser.
Essayons autant que possible de nous souvenir de l’origine de notre nourriture.
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
Sources de cette lettre :
[1] http://ift.tt/2rmPRjC
[2] http://ift.tt/2sPnAG1
[3] http://ift.tt/1lZxXvj
[4] http://ift.tt/Tz6mXX
[5] http://ift.tt/2jZRwfH
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